Avril 2007 - n°120

Lancement du réseau EDIT, European Distributed Institute of Taxonomy

Fin juin dernier, le Muséum National d’Histoire Naturelle a organisé la réunion de lancement du réseau d’excellence européen EDIT (European Distributed Institute of Taxonomy). Le Muséum, institution leader du réseau, a réuni les directeurs et les scientifiques des établissements partenaires autour des enjeux de la recherche taxonomique pour promouvoir le projet tant au niveau national qu’international, et lui donner toute la résonance que méritent ses objectifs ambitieux.

La taxonomie, une science au cœur de la connaissance de la biodiversité !

Gérer et conserver la biodiversité implique de bien savoir nommer et classer les êtres vivants. C’est tout le sens de la taxonomie. Apparue au 18ème siècle, tombée en désuétude dans les années 1960, la taxonomie connaît aujourd’hui un regain spectaculaire. Mais, les connaissances taxonomiques existantes sont inégales selon les familles du vivant, dispersées dans les collections et les bibliothèques des grandes institutions, et sont peu accessibles aux décideurs du secteur de l’environnement.

Les étapes de travail du taxonomiste ? 10 % : collecte sur le terrain et obtention de matériel dans les collections ; 70 % : observation, comparaison et construction de nouvelles connaissances ; 20 % : réalisation d’un manuscrit publiable : environ trois ans dans les meilleurs des cas… sans compter le temps moyen de publication entre la réception du manuscrit par un éditeur, sa soumission à un comité de relecture et l’impression.

Avec le réseau EDIT, le temps de travail pour réviser des taxons et décrire une nouvelle espèce pourrait être divisé par 3 ou 4 !

Un consortium d’institutions soutenu par la Commission européenne

EDIT est un « réseau d’excellence européen », un consortium d’institutions soutenu par la Commission européenne (6ème PCRD). Depuis 2002, les réseaux d’excellence sont des instruments stratégiques, créés par la Communauté européenne, afin de remédier à la fragmentation de la recherche dans les domaines dont l’importance justifie une telle action.

Pour toute l’Europe, 16 réseaux d’excellence sont soutenus par la Commission Européenne sur le thème « Développement durable », dont 6 dans le domaine de la biodiversité (deux en génétique, trois en écologie, un en taxonomie : EDIT) et 4 coordonnés par une institution française (Marine Genomics / CNRS, Eurocéans / CNRS, Evoltree / INRA et EDIT / Museum).

EDIT a obtenu le meilleur score d’évaluation de l’appel d’offre sur le thème « Développement durable, changement global et écosystèmes », lancé en 2004.

Formé à l’initiative du CETAF (Consortium Taxonomic Facilities), coordonné par le Muséum et dirigé par le Professeur Simon TILLIER, le réseau EDIT bénéficie d’un budget de 11,9 millions d’euros pour cinq ans.

Il rassemble ainsi 26 des plus importantes institutions taxonomiques européennes, nord-américaines et russes dont le Natural History Museum de Londres, le jardin botanique royal de Kew, le muséum d’histoire naturelle de la Smithsonian Institution de Washington, le Missouri Botanical Gardens et les instituts de zoologie et de botanique de Saint Petersbourg.

L’objectif du réseau EDIT est de coordonner et d’intégrer leurs programmes de recherche et leurs infrastructures pour répondre aux besoins de la taxonomie. Ces outils sont primordiaux pour permettre aux taxonomistes européens de garder leur leadership mondial et d’enrichir l’inventaire indispensable de la biodiversité.

Les premiers projets d’EDIT…

EDIT réunit 400 à 600 millions de spécimens en collection, soit environ 30 % des collections mondiales ; 600 à 1 000 taxonomistes professionnels, soit 20 % des effectifs mondiaux ; des millions de livres, articles… en taxonomie ; des collections inégalées de documentations !

Le réseau affiche donc assurément un leadership mondial, mais globalement, moins de 10 % des collections, et pratiquement aucune littérature, ne sont informatisées et accessibles par le web actuellement. Un gros effort reste également à fournir pour intégrer des institutions aux statuts différents et qui étaient en concurrence depuis plus d’un siècle…

Les premiers projets en cours d’EDIT sont :
- la création d’une infrastructure virtuelle sur le web, pour permettre à la fois aux chercheurs de travailler ensemble pour créer de nouvelles connaissances, et aux utilisateurs de trouver plus facilement l’information qu’ils recherchent ;
- la création d’un modèle d’organisation des inventaires d’espèces, la définition de standards et la réalisation d’inventaires coordonnés dans des aires protégées ;
- la création d’un cursus européen de taxonomistes formés aux méthodes modernes de la systématique, pour renforcer des capacités scientifiques reconnues mondialement comme insuffisantes pour faire face aux besoins, pour former les experts dont tant l’Europe que les pays en développement ont besoin pour conserver et gérer leur biodiversité.

A travers l’intégration des institutions et de leurs recherches, l’objectif d’EDIT vise à augmenter la qualité, le rendement et l’accessibilité des résultats par le changement qualitatif de la recherche et de la formation.

SD