Avril 1997 - n°17

Evaluation des interactions contenant/contenu par chromatographie couche mince,

Les conditionnements en matériaux plastiques sont de plus en plus utilisés dans l'industrie pharmaceutique, en remplacement du verre, lourd et cassant. Cependant, ces matériaux ne sont pas inertes vis-à-vis des solutions contenues dans ces conditionnements. Des phénomènes de migrations entre le contenant et le contenu peuvent intervenir dans les deux "sens":

1/ fixation des constituants de la solution sur le conditionnement, provoquant une baisse des concentrations et donc de l'efficacité thérapeutique du médicament,

2/ relargage des additifs du matériau plastique dans la solution, dont les teneurs sont limitées à cause de leurs caractères potentiellement toxiques.

L'analyse des additifs présents en solution peut être réalisée par chromatographie couche mince (CCM) après un contact standardisé entre la solution et le conditionnement selon les normes ICH2:

- conditions de conservation: 25°C/60%H.R. et 40°C / 75% H.R.,

- positionnement des flacons "tête bêche" pour l'évaluation complète des matériaux du conditionnement (bouchon compris),

- analyse à T0 et T6 mois.

AR2i possède un savoir-faire reconnu dans ce domaine, en collaboration avec le Laboratoire de Chimie AnalytiqueIII de la Faculté de Pharmacie de Châtenay-Malabry (Pr. Baylocq-Ferrier). L'originalité de l'approche est l'utilisation de la chromatographie planaire, ou CCM instrumentale, couplée à la détection multi-mode: UV et visible/ avant et après révélation. L'intérêt que revêt cette méthode a été démontré et s'exprime essentiellement en termes de sensibilité et de spécificité. En effet, contrairement à d'autres techniques chromatographiques, tous les composants potentiellement extraits sont retrouvés sur la plaque. Deux systèmes chromatographiques différents sont utilisés pour balayer un large domaine de classes chimiques de contaminants. Après chromatographie, les plaques sont détectées à l'aide d'un photodensitomètre scanner, d'une part en U.V. direct, et d'autre part dans le visible après révélation chimique. Cet article décrit un exemple de méthodologie utilisée.

METHODE ANALYTIQUE

La méthode analytique se décompose en quatre étapes principales:

Préparation de la gamme d'étalonnage

Une solution témoin d'additifs est réalisée dans du chloroforme, à une concentration de 25mg% pour chaque composé.

Les additifs recherchés dépendent de la nature du matériau plastique utilisé. Pour exemple, les composés sélectionnés ici correspondent aux grandes classes d'anti-oxydants:

BHA : Butyl Hydroxy Anisol

BHT : Butyl Hydroxy Toluène

Irganox1010 : Tétrakis [(di-tert -butyl-3,5 hydroxy-4 phényl)-3 propionate] de pentaérythrityle

Irganox 1330: Hexa-tert -butyl-2,2',2",6, 6', 6" (triméthyl-2,4,6 benzènetriyle -1,3,5 trisméthylène)-4,4',4" triphénol

La gamme d'étalonnage est réalisée dans une solution reconstituée de produit fini, acidifiée à pH4 par de l'acide chlorhydrique dilué.

Les solutions à analyser sont aussi acidifiées à pH4 par de l'acide chlorhydrique dilué.

GAMME D'ETALONNAGE

Extractions

Deux types d'extractions sont envisageables:

* extraction liquide/liquide, par contact entre 50ml de solution de 2fois 5ml de dichlorométhane.

* extraction liquide/solide, par passage de 50ml de solution au travers d'une cartouche "Sep pak® plus" C18 (Waters).

- L'élution de la cartouche est réalisée par 3ml de chloroforme, avec filtration simultanée en présence de sulfate de sodium anhydre pré-imbibé de chloroforme, suivi d'un rinçage du filtre par 2ml de chloroforme. L'utilisation d'une seringue en verre est recommandée.

Concentration

La récupération des solvants d'extraction ou d'élution est réalisée dans des tubes coniques en verre de 15ml. L'évaporation de ces solvants est réalisée à sec sous air comprimé (sans chauffage). Les extraits secs sont repris par un volume de 50µl de chloroforme, représentant ainsi une concentration d'un facteur1000 des échantillons (passage de 50ml à 50µl).

ANALYSE PAR CHROMATOGRAPHIE COUCHE MINCE

Le dosage est réalisé par chromatographie couche mince instrumentale sur des plaques de HPTLCRP18, 10x20cm, sans indicateur de fluorescence, provenant de chez Merck (réf: 5914).

Les appareillages suivants sont utilisés pour réaliser les dépôts et la quantification des chromatogrammes:

- déposeur automatiqueAS30 (Desaga),

- densitomètre CD60 (Desaga),

- et, système de révélation Derivapress® (AR2i).

Deux méthodes de chromatographie couche mince sont réalisées à partir des solutions chloroformiques d'extraction.

(*): T.H.F. non stabilisé, ne contenant pas d'hydroquinone.

La distance de migration est de 65mm.

Après le séchage de la plaque chromatographique, la lecture densitométrique est réalisée par le photodensitomètreCD60. Deux détections sont réalisées sur chaque plaque: avant révélation et après révélation à l'aide du système de "Dérivation sous pression": Dérivapress®.

Des exemples de chromatogrammes sont présentés ci-après. (voir graphiques 1 et 2)

CONCLUSION

Du fait de l'utilisation croissante des matériaux plastiques dans les articles de conditionnement, les interactions contenant/contenu sont des phénomènes importants qui sont de plus en plus pris en compte lors des études de stabilité des préparations liquides dans les industries pharmaceutique et alimentaire. Correctement utilisée en respectant les critères de Bonnes Pratiques de Laboratoire, la méthodologie décrite dans cet article présente de nombreux avantages:

- tous les composés sont retrouvés sur la plaque,

- utilisation de deux systèmes chromatographiques différents,

- utilisation d'un ou plusieurs réactifs de révélation spécifiques,

- bonne sensibilité,

- bonne reproductibilité,

- quantification possible.

Les résultats de ces analyses apportent une garantie complémentaire de l'innocuité des matériaux plastiques vis-à-vis des solutions médicamenteuses. La chromatographie couche mince, précédée d'une technique d'extraction, est une méthode simple et rapide d'identification et de quantification des additifs dans ce cadre d'études, et elle est tout à fait reconnue au niveau des dossiers d'enregistrement d'autorisation de mise sur le marché (A.M.M.- partie II-F).

 

par Christian Sarbach et Pascal Delvordre
AR2i.