Juin 1997 - n°19

Sécurité alimentaire: assurer le contrôle de la non rupture de la propreté

Les enjeux de la sécurité alimentaire

L'exigence d'un très haut niveau qualitatif des productions agro-alimentaires est principalement née de l'évolution des demandes des consommateurs, de la compétition internationale entre industriels et de la nécessité d'éliminer les risques d'intoxications alimentaires.

L'enjeu SECURITE s'est ainsi développé à partir d'un ensemble de pressions exercées sur les fabricants. Il est en effet aujourd'hui nécessaire d'avoir une stratégie préventive de sécurité.

La chaîne "Stratégie préventive de la sécurité alimentaire"

La salubrité commence dans les champs, par l'utilisation de produits de traitement plus sélectifs et le développement de l'agriculture raisonnée. S'en suivent des actions contre la pollution des eaux, pour la surveillance des épidémies (les Salmonelles sont responsables de 85% des toxi-infections alimentaires déclarées) et pour la maîtrise biologique des chaînes de fabrication, impliquant notamment la mise en place de plans d'actions: audits qualité, HACCP, certification...

"Non stop", la salubrité doit ensuite être caractéristique de tous les maillons de la stratégie de sécurité alimentaire.

Le contrôle microbiologique des matières premières et des produits finis est une obligation légale; le décret 91.409 du 26 avril 1991 stipule, en effet, l'obligation d'autocontrôles dans la qualité des produits et le dénombrement de certaines bactéries.

Le respect des normes officielles est un impératif absolu ; à l'exemple de celles décrites ci-dessous:

Salmonelles sp absence dans 25 g d'échantillon

Listeria monocytogenes idem

E. Coli < 100 germes par gramme

Staph. aureus idem

La notion de salubrité est donc présente en amont, dès le stade de la recherche; les efforts de recherche en produits diversifiés et à meilleure valeur ajoutée doivent intégrer les conditions d'hygiène et d'asepsie ainsi que les systèmes de diagnostic de contaminants microbiologiques ou chimiques les plus performants.

Mais, la salubrité est également une nécessité en aval, au niveau du consommateur, qui doit lui aussi veiller à respecter certaines règles d'hygiène dans les lieux de conservation de ses aliments. Le consommateur représente alors un maillon fondamental de cette stratégie de sécurité alimentaire.

La maîtrise de l'hygiène

C'est une problématique apparemment simple, mais qui nécessite une approche particulière à chaque entreprise, au sein de chaque unité de production.

Le contrôle des dérives du nettoyage, la connaissance des vecteurs de microbes, la caractérisation de l'écologie microbienne de l'environnement de la chaîne de production sont alors primordiaux.

- Les causes de dérives du nettoyage:

La qualité du produit fini est très influencée par le déblayage, le nettoyage, la désinfection.

Si les lignes de fabrication sont sales, le développement bactérien de résidus alimentaires provoque la contamination du produit fini et remet en cause les dates de péremption ainsi que la sécurité alimentaire.

Différentes causes de dérives sont à prendre en considération: le facteur humain (rotation des opérateurs, personnel temporaire, mauvaises habitudes...), les divers niveaux de changements (par exemple, les procédures de nettoyage et de production, la nature des produits fabriqués, les matières premières, les détergents, les désinfectants...), l'obsolescence ou le vieillissement du matériel de production, les variations de l'environnement (conditions climatiques, saisons), les pics de production, les mauvaises procédures ou les produits de nettoyage inadaptés.

- Connaître les vecteurs de microbes

Les niches contaminatrices en usine sont nombreuses, mais les microbes ont besoin de vecteurs pour aller d'un point à un autre.

Les matières premières elles-mêmes (viande, poisson, graines, lait) peuvent être sources de contamination microbienne. Des contaminants peuvent survivre après désinfection et se multiplier dans les produits. Le personnel, mais également les monte-charges, les convoyeurs, le matériel d'emballage peuvent eux-aussi servir de moyen de transport à ces microbes.

Les vecteurs de transmission, très nombreux, représentent des maillons particulièrement importants de la chaîne de propreté; il est indispensable de les connaître précisément afin de mieux les maîtriser.

- Investiguer et caractériser l'écologie microbienne de l'environnement

L'environnement de la production comporte un ensemble de maillons formant une chaîne de risques de contamination.

La pression contaminatrice extérieure, la partie réception des matières premières, les aires aux alentours des zones de production et la ligne de production baignent dans un ensemble plus ou moins favorable à la propagation et à la colonisation des contaminants.

Une microflore variée non maîtrisée peut s'installer sur des surfaces d'équipements, dans des zones humides non maîtrisables, des échangeurs de chaleur, des conduites d'eau..., et profiter de la formation de biofilms pour rompre la chaîne de propreté.

Il importe donc d'organiser des zones de contrôle en fonction des éléments favorables à toute colonisation microbienne.

Chaque maillon est important, car la chaîne casse là où le maillon est défaillant. La maîtrise de l'hygiène passe par la connaissance des paramètres négatifs et une vigilance constante de tous les acteurs, le respect du cahier des charges du service de nettoyage industriel, la mise en place de systèmes de contrôle de résultats sur site.

Le monitoring : surveillance des pathogènes indicateurs

Les contaminants microbiens ou chimiques cassent la chaîne de propreté dans les eaux, sur les surfaces, dans l'air, sur les murs, les sols, les plafonds... La surveillance des pathogènes doit donc s'exercer partout pour garantir un produit sain sur la table.

Des réactifs et systèmes de diagnostic permettent de fixer des seuils d'acceptabilité calculés pour chaque site de production. Etant donné la diversité des usines agro-alimentaires et des différents standards d'hygiène requis, il est impossible de donner un seuil universel d'acceptabilité.

Ces méthodes de diagnostic, de plus en plus utilisées, donnent des informations sur des paramètres différents:

- les méthodes traditionnelles donnent par boîtes de contact la mesure de la contamination microbienne (TVC, soit Total Viable Count, numération totale de colonies).

- les méthodes alternatives indiquent par ATPmétrie ou impédancemétrie toute contamination biologique.

En situation spécifique, leur utilisation permet:

- l'établissement des seuils d'acceptabilité en déterminant l'état sanitaire habituel du site de production, en fonction des procédures de nettoyage/désinfection utilisées,

- le choix d'un certain nombre d'endroits à contrôler par site, pendant la production, après déblayage, détergence, désinfection. L'établissement de valeurs courantes permettent alors d'établir un tableau de bord de gestion des écarts.

- la responsabilisation du personnel à la non rupture de la chaîne propreté.

L'avenir...

La population du globe passera de 6milliards d'hommes à 10milliards d'ici trente ans. Cela signifie que d'ici là, les productions agricoles et agro-alimentaires mondiales devront augmenter de 75%.

La sécurité alimentaire ira alors bien au-delà des petites défiances de la vie quotidienne ; viser l'excellence des procédures de contrôle de la qualité de la chaîne propreté devient plus qu'un challenge économique: c'est la santé de tous les hommes qui est en jeu...

 

par Mr LE DENTU,
président de l'AFIDIALE