Février 2006 - n°107

Le dosage des allergènes, conformément aux nouvelles exigences réglementaires

par SGS Multilab

La tendance était là et les faits sont clairs : pour le cas des allergies, c’est aujourd’hui un enfant européen de moins de dix ans sur quatre qui en souffre ! Un phénomène inquiétant qui ne cesse de croître.

Tous les acteurs, du législateur au distributeur, en passant par les producteurs et les industriels, sont mobilisés. Objectif : Transparence, Traçabilité, Sécurité, Protection des consommateurs et Gestion des risques pour la santé.

Au quotidien, cela se traduit par des contrôles et un étiquetage des produits toujours plus poussé, notamment l’étiquetage des composés allergènes sur les détergents et les produits alimentaires, conformément aux nouvelles réglementations mises en œuvre en octobre et novembre 2005.

Afin de répondre aux questions techniques concernant ces nouvelles exigences réglementaires, le laboratoire SGS Multilab Rouen vous propose de faire le point sur ce sujet d’actualité.

Pourquoi recherche-t-on ces composés ?

Aujourd’hui, on estime que 2 % de la population européenne sont affectés par des allergies aux parfums ; les chiffres étant beaucoup plus élevés chez les enfants et les personnes âgées. Ces molécules ne sont pourtant pas les seules à créer des « allergies », c’est-à-dire une réponse excessive de l’organisme à un agent dit « allergène » auquel il est particulièrement sensible. Tout aussi surveillé et critique pour certains consommateurs : l’allergie alimentaire. Dans ce cas, ce sont souvent des protéines qui sont en cause (ex : la protéine d’arachide).

Pour les personnes allergiques, la seule solution est d’éviter les aliments ou composés contenant des allergènes. Un étiquetage détaillé des ingrédients allergéniques est donc essentiel ; un étiquetage défini par le dispositif réglementaire qui s’applique aux produits de consommation non alimentaire, d’une part, et alimentaire, d’autre part.

7ème amendement de la directive européenne sur les cosmétiques

En 2003, les produits cosmétiques ouvrent la marche avec la publication du 7ème amendement de la directive européenne (JO du 11 mars 2003) : une liste de 26 substances allergènes est identifiée et la présence d’une des substances doit être mentionnée dès lors que leurs concentrations dépassent 0,001% pour les produits à ne pas enlever (crème…) et 0,01% pour les produits à éliminer par rinçage.

En complément de la liste présentée en page suivante, 4 composés sont sous surveillance : le phénylacétaldéhyde, l’estragol, le méthyl-2-monyoate et le méthyleugénol. Ce 7ème amendement crée ainsi une obligation d’étiquetage et se fonde sur l’avis du Comité Scientifique des produits cosmétiques et des produits non alimentaires destinés aux consommateurs (SCCNFP).

Les produits détergents à l’essai

Depuis le 8 novembre 2005, les produits Détergents sont soumis aux mêmes analyses et contraintes d’étiquetage. Mais, plus loin que leurs risques allergéniques pour le consommateur, les autorités exigent une étude de la composition et du comportement des détergents dans l’environnement. Leur capacité de dégradation dans l’environnement - c’est-à-dire leur biodégradabilité - doit notamment être analysée, et la présence de conservateurs de type « perturbateurs endocriniens », surveillée. La directive 648/2004/CE qui définit le cadre pour les détergents vise la composition des fragrances de ces produits et se réfère à la liste du 7ème amendement pour les composés allergènes.

Produits alimentaires : à la recherche des épitopes

La directive 2003/89/CE du 10 novembre 2003, modifiant la directive 2000/13/CE, est entrée en vigueur le 25 novembre dernier. Elle énumère les ingrédients devant être mentionnés sur l’étiquetage indépendamment de la quantité présente dans l’aliment fini.

Les mécanismes allergiques ne sont en effet pas nécessairement proportionnels à la quantité. Une faible exposition peut suffire pour créer de dangereuses réactions de l’organisme : l’allergénicité est provoquée par une portion de la protéine : l’épitope ou déterminant antigénique, un petit peptide en général à la surface des protéines. Cette liste comprend aujourd’hui 12 ingrédients allergènes identifiés dans l’annexe III bis.

En complément, la directive 2005/26/CE du 21 mars 2005 établit une liste des substances ou ingrédients alimentaires provisoirement exclus de l’annexe III bis. La moutarde, par exemple, étant responsable d’allergie et listée dans l’annexe III bis, est soumise à l’étiquetage. Ce n’est pas le cas, en revanche, de l’un de ses dérivés, l’huile de moutarde, qui après étude et avis de l’autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA), n’est pas considérée comme possédant des propriétés d’allergénicité.

Les allergènes alimentaires les plus courants interviennent dans la composition d’une grande variété d’aliments préparés. Ils peuvent être de plusieurs types : ingrédients additifs (colorants, conservateurs, émulsifiants, gélifiants), auxiliaires technologiques et autres substances. Les produits non-conformes à cette directive seront interdits à la vente à partir du 25 novembre 2005. Les produits mis sur le marché ouétiquetés avant cette date et non-conformes à cette directive pourront néanmoins être commercialisés jusqu’à épuisement des stocks.

« Sur cette base, ce sont tous les produits qui sont sous surveillance : les matières premières pour éviter qu’un ingrédient non-conforme contamine le process, le produit fini pour garantir la conformité de sonétiquetage, ainsi que le produit distribué pour s’assurer qu’il n’y a pas eu de contaminations croisées lors du process (liés à la fabrication de produits différents sur des chaînes de production) » précise Dalila Hachani, Responsable Analyses Biotechnologiques SGS Multilab Rouen.

Quid du dosage des allergènes ?

Que l’on parle d’allergènes alimentaires ou d’allergènes de la liste des 26 substances, les techniques d’analyses et de caractérisations sont différentes et font appel aux connaissances des ingénieurs de chimie analytique. Il est essentiel de trouver la méthode la plus adaptée selon le type de molécules.

=> Liste des 26 allergènes :
D’une façon générale, on peut dire que les molécules de la liste des 26 allergènes, dosées sur les produits non alimentaires cosmétiques, DPH, parfums, fragrances, sont des molécules de faible poids moléculaire (ex : farmesol) et font l’objet d’une caractérisation par chromatographie gazeuse couplée à la spectrométrie de masse (GC/MS). Il s’agit alors de doser 26 molécules de structures différentes.

Dans ce domaine, la méthode doit être assez sensible pour atteindre les seuils requis d’étiquetage 0,001 % et 0,01 %. La méthode doit être spécifique et adaptée à la complexité des matrices, évitant toute interférence. La méthode GC/MS/CI a été la méthode adoptée, validée et retenue par le groupe de travail de normalisation de l’IFRA.
« Pour les matrices très complexes, l’analyse en GC/MS peut se révéler insuffisante », souligne M. Yvon GERVAISE, Directeur du Laboratoire SGS Multilab Rouen. « C’est pour cette raison que notre laboratoire développe des méthodes en GC/MS/MS… »

=> Liste des 12 allergènes alimentaires :
Dans le domaine alimentaire, les molécules allergéniques sont de tout autre nature ; ce sont des fractions de protéines que l’on appelle « épitopes ». En fonction de l’origine du produit, la nature de l’allergène est différente. Par exemple pour l’arachide, les molécules allergènes sont dispersées dans les fractions arachine et conarachine (ara hl, ara hll entre autres sont deux sousunités de ces fractions puissamment alllergènes).

Les méthodes d’analyses répondant au dosage et à la quantification après extraction et purification sont de trois ordres :

* Immunochimie type Elisa (Enzym Linked Immuno-Sorbent Essay) : méthode la plus fréquente qui permet de rechercher directement l’allergène par une réaction antigène/anticorps relativement sensible, si le laboratoire possède les techniques appropriées de traitement et d’échantillonnage (la limite de détection est de l’ordre du ppm, soit 1 mg/kg).

* Biologie moléculaire par PCR : méthode qui consiste à rechercher la séquence d’ADN de l’espèce par PCR (ex : blé). C’est l’ingrédient par sa structure génétique qui est caractérisé. Cette méthode ne permet pas de vérifier la présence réelle de l’allergène (l’ADN peut être présent, sans que la protéine le soit), mais permet de vérifier une non-contamination de matière première, de produit fini ou l’efficacité des opérations de désinfection.

* Méthodes chimiques : cas du dosage des sulfites par distillation.

Les techniques d’analyse ont évolué ; la méthode Elisa s’avère sensible et robuste, permettant la recherche et la quantification de la protéine allergène. Cette approche peut être complétée, si nécessaire, par la méthode PCR.

« Quelle que soit la méthode, le cœur de l’analyse réside souvent dans la phase d’extraction qui permettra de séparer correctement les composés des ingrédients. » ajoute Dalila Hachani, Responsable Analyses Biotechnologiques SGS Multilab Rouen. En France, les laboratoires SGS Multilab, accrédités COFRAC, sont à même de réaliser toutes les analyses d’allergènes sur les produits cosmétiques, alimentaires, et les produits détergents…