Juin 2001 n°59

VIGICELL étudie la détection des signaux de défense cellulaire et crée un test de biocompatibilité

Créée en septembre 1999, VIGICELL est une start-up centrée sur l'étude et l'exploitation des mécanismes de défense et de protection mis en place par les cellules, en réponse à diverses agressions : endogènes (pathologies) ou exogènes (stress chimique et physique).

La technologie développée par son équipe a conduit à la mise au point d'un test global de biocompatibilité. Son objectif : détecter, puis remédier aux problémes environnementaux et de santé, dans tous les domaines économiques.

Zoom sur cette jeune société, lauréate du 1er appel à projets ministériel pour la création d'entreprises de technologie innovante, actuellement en phase d'augmentation de capital.

De la recherche académique à la création d'entreprise

A l'origine de la création de VIGICELL, Yoléne THOMAS et Jean-Paul OUDINET sont tous deux chercheurs au sein du Laboratoire de Biogéographie, Unité Mixte de Recherche CNRS / Ecole Normale Supérieure /LSH

Au coeur de leurs travaux de recherche : l'immunologie moléculaire et cellulaire - plus précisément les biomarqueurs autour du théme central de la santé environnementale.

A travers des études approfondies sur la compréhension des voies de signalisation de l'activation lymphocytaire ou neuronale, l'équipe a eu l'idée d'exploiter les signaux d'alerte émis par les cellules face à un milieu agressif, pour l'évaluation de la bioqualité des milieux, la détection des stimuli agresseurs et de leurs effets biologiques.

En 1999, M. BEHAR, fort d'une solide expérience dans la création d'entreprise, se joint à Yoléne THOMAS et Jean-Paul OUDINET pour mettre en oeuvre ce projet. La société VIGICELL voit le jour en juillet 99, soutenue en septembre de la méme année par le Ministère de la Recherche et de la Technologie dans le cadre du 1er appel à projets pour la création d'entreprises de technologie innovante (1 million de francs).

VIGICELL répond alors à trois objectifs :

- valoriser la technologie issue des travaux fondamentaux de l'équipe mixte CNRS/ENS à travers une politique active d'applications industrielles.

- organiser la liaison, dans les domaines de l'environnement et de la santé, entre ses propres activités de recherche appliquées, celles de ses partenaires, et les laboratoires institutionnels (universités - Grandes Ecoles) qui interviennent dans la recherche fondamentale en Europe et aux USA.

- compléter le budget alloué par le CNRS à l'UMR par des apports financiers venant de l'industrie.

Une technologie validée pour plusieurs types cellulaires

La technologie exploitée par VIGICELL repose sur le fait que toute cellule (végétale, animale et donc humaine) en contact avec un milieu agressif, se protège par des mécanismes d'activation des gènes de stress et autres systèmes de défense intracellulaire (modification des structures protéiques ou génération d'espèces réactives de l'oxygène).

La mise en évidence de ces signaux, par les techniques de biologie cellulaire et moléculaire (Northern Blot, RT-PCR), constitue alors une "bioalerte" pertinente, intervenant avant toute modification définitive et irréversible des cellules, donc avant toute mort cellulaire.

"Parmi ces signaux dont l'expression est sensible à différentes classes d'agents agressifs, figurent les protéines de stress dont les protéines de choc thermique de type hsp, les métalloprotéines de type métallothionéine et les monooxygénases à cytochrome P450, des composés qui peuvent étre considérés comme des "biomarqueurs" ou "biomoniteurs" de l'agression", nous explique Leta POSHO, PhD biochimiste, chercheur scientifique au sein de VIGICELL.

Le principal type cellulaire utilisé dans la mise en évidence des "bioalertes" correspond aux cellules du systéme immunitaire : les lymphocytes T.

"D'autres types cellulaires sont aujourd'hui également utilisés en vue d’étendre la méthodologie conçue par notre équipe", nous confie Leta POSHO. "Par exemple, les kératinocytes s'avérent plus appropriés pour tester les produits cosmétologiques, les cellules épithéliales de l'intestin et les cellules du foie pour les molécules à visée pharmaceutique. Nous étudions également les cellulesdu systéme nerveux ou encore les cellules de poisson (pour le secteur environnemental)"

Un très large champ d'applications

Basée sur l'exploitation des réactions spontanées des cellules, la technologie VIGICELL permet :

- de mettre en évidence un environnement hostile, c'est-à-dire de détecter la présence de molécules non biocompatibles dans l'environnement cellulaire

- de suivre chronologiquement les conséquences d'une intoxication, de noter sa durée et la persistance éventuelle aprés que le produit toxique ait été enlevé ;

- de vérifier l'efficacité de principes de protection présumés actifs.

Cette technologie simple, sensible, fiable et rapide est donc adaptée à l'exercice d'une surveillance globale et constitue un outil complémentaire aux méthodes physico-chimiques, pour des applications trés variées. Les secteurs du traitement de l'eau, la cosmétologie, la pharmacologie et l'environnement sont directement concernés.

A noter que dans le domaine de l'environnement, le test VIGICELL - contrairement aux techniques de physico-chimie classique - offre l'avantage de détecter des quantités faibles de polluants et de mettre en évidence la synergie éventuelle de ces micropolluants associés.

De même, en pharmacologie, la technologie VIGICELL peut étre utilisée à trois niveaux :

- dans l'évaluation de la biocompatibilité des molécules synthétisées, avant même de tester in vitro leur activité pharmacologique (gain de temps et de coût pour la sélection de ces composés)

- pour tester de façon complémentaire la cytotoxicité aux faibles concentrations du médicament en développement

- pour vérifier et confirmer aprés traitement la bioactivité du médicament.

"La disparition de l'induction des biomarqueurs du stress constitue en effet une preuve de l'efficacité du traitement " précise Leta POSHO.

Des objectifs en étroite relation avec l'industrie

La culture cellulaire, l'extension ARN, l'amplification RT-PCR, l'emploi de radioisotopes ou encore l'analyse densitométrique sont au coeur des techniques utilisées par VIGICELL.

Son équipe, actuellement répartie sur plusieurs sites franciliens, bénéficie de la mise à disposition d'équipements de haute technologie au sein de diverses structures, notamment d'un microscope confocal et d'un appareil de cytométrie de flux au sein de l'Institut de génétique moléculaire de Cochin.

L'équipe collabore étroitement avec de nombreux laboratoires en France et à l'international ( Suisse, USA, Canada). C'est d'ailleurs dans ce contexte de partenariats scientifiques et technologiques que VIGICELL entend poursuivre le développement de ses activités.

Au coeur des priorités de la jeune société :

- la concrétisation de contrats avec l'industrie, notamment avec les secteurs de la pétrochimie, de la cosmétique de l’environnement.

- l'ouverture du capital aux capitaux-risqueurs français et étrangers

- l'intégration de son équipe dans de nouveaux locaux mieux adaptés au développement de ses activités et l'automatisation de son laboratoire de biologie moléculaire dans le but de transcrire sa technologie sur puce à ADN.

- l'approfondissement de ses travaux de R&D, en particulier pour la validation de sa technologie sur d'autres modéles cellulaires.

Actuellement animée par une équipe de 6 personnes, VIGICELL a pour objectif de recruter 10 collaborateurs supplémentaires dans les trois prochaines années et d'étendre rapidement ses activités à l'international. Gageons que cette jeune entreprise saura mener à bien l'ensemble de ses projets.

Contact :

M. Isaac BEHAR