Juin 2002 - n°69

ZIMGEN
Une nouvelle plate-forme technologique spécialisée dans le traitement de la thrombose

Pierre-Emmanuel MARQUE – 34 ans, docteur en Pharmacie et docteur en Biologie -, Bernard LE BONNIEC – 47 ans, directeur de recherche à l’INSERM, expert en bio-ingénierie des protéines -, Bruno O. VILLOUTREUX – 38 ans, également directeur de recherche à l’INSERM, spécialiste en bio-informatique structurale – et Xavier MORELLI – 28 ans, chercheur en cristallographie et RMN biologiques – constituent l’une des 10 équipes lauréates en 2002 des Tremplins de la “ création d’entreprise en santé humaine ”, organisés par la Fondation Aventis-Institut de France.

Les Tremplins de la Fondation Aventis – Institut de France

Rappelons que ce programme, débuté en France en 1998, récompense et accompagne chaque année 10 projets innovants de création d’entreprise dans la santé humaine, portés par de jeunes scientifiques.
Dotés en 2002 d’un budget global de 458 000 euros, les " Tremplins de la Création d’entreprise en Santé humaine " dépassent de loin le simple soutien financier et représentent une véritable rampe de lancement pour ces projets scientifiques prometteurs. A ce jour 32 start-up en santé ont déjà bénéficié de l’accompagnement spécifique des Tremplins .

Ainsi, au-delà de la prime de 31 000 euros allouée à son projet – atout essentiel quand il s’agit de convaincre de nouveaux investisseurs -, Pierre-Emmanuel MARQUE bénéficie également de plusieurs aides complémentaires de première importance. Parmi celles-ci :
- le soutien d’un parrain, “ senior expert ”, membre de l’Office Technique d’Etudes et de Coopération Internationale (OTECI) qui, pendant un an, lui apporte son expérience et mobilise son réseau relationnel à son service ;
- une formation sur-mesure à l’Université Paris-Dauphine pour répondre à ses besoins spécifiques (constitution de business-plan, droits des contrats, propriété industrielle…) et lui permettre de croiser son expérience avec celle des 9 autres chercheurs-entrepreneurs lauréats des Tremplins .
- le soutien technique et moral du Club ALFA, Association des Lauréats des tremplins de la Fondation Aventis-Institut de France, dont le but est de favoriser l’entraide entre les vainqueurs de toutes les promotions des Tremplins et d’encourager les synergies de business entre jeunes start-
up.

Grâce au programme des Tremplins et au soutien actif du département “ Valorisation et Transfert technologique ” de l’INSERM, Pierre-Emmanuel et ses co-équipiers ont pu concrétiser en juin 2002 leur projet de création. La société ZimGen a pour vocation la recherche et le développement de nouvelles molécules destinées au traitement des thromboses. “ “ ZimGen ” : en référence aux précurseurs inactifs des protéines responsables de la coagulation, appelés zymogènes ”, souligne M. MARQUE.

Objectif phare de l’entreprise : devenir le leader mondial dans le développement de nouvelles stratégies antithrombotiques plus sûres et plus efficaces.

Pharmacien et bio-entrepreneur !

C’est à travers sa double formation de docteur en Pharmacie et docteur en Biologie que M. Pierre-Emmanuel MARQUE a imaginé et mis en œuvre son projet. Son intérêt pour le sujet de la thrombose remonte à plus de 10 ans, lors de ses premières années d’études en Pharmacie à Toulouse : la thrombose, phénomène qui, en formant un caillot dans un vaisseau sanguin, prive les organes de sang et d’oxygène et peut alors déclencher infarctus du myocarde ou accident vasculaire cérébral.
Très tôt, Pierre-Emmanuel en est persuadé : beaucoup de connaissances sont à compléter et de nombreux progrès restent à réaliser dans le domaine de la coagulation et des pathologies thrombotiques. Il choisit donc de faire son internat en biologie médicale à l’Université Paris V, puis prépare une thèse en bio-ingénierie des protéines, en parallèle de recherches conduites avec le Professeur Martine Aiach, directeur de l’unité INSERM 428, sur les mécanismes de la coagulation.
Polyvalent et sans cesse en quête de nouvelles connaissances, le Docteur MARQUE s’est également toujours intéressé de très près à l’approche industrielle. En 2000, fort de ses résultats de recherche sur le comportement de molécules impliquées dans la coagulation, il décide de mettre en place une plate-forme technologique dédiée à la recherche et au développement de nouveaux antithrombotiques.
“ Si le sang ne coagulait pas, il suffirait d’une simple égratignure pour que notre corps se vide complètement ”, nous explique M. MARQUE. “ Le “ tampon ” formé par le sang séché colmate l’hémorragie. Pourtant, ce processus naturel et vital peut aussi menacer la vie, car la coagulation se produit quelquefois là où il ne faut pas : dans un vaisseau sanguin, en formant un caillot. ”.
Pour rétablir au plus vite l’irrigation du sang, les médecins disposent aujourd’hui d’une panoplie de médicaments antithrombiques – telle que l’héparine – aux propriétés anticoagulantes. Mais, ces médicaments sont incapables de discerner la coagulation naturelle de la thrombose pathologique. Résultat : le patient soigné risque une hémorragie…

Le traitement idéal qui pourrait agir sélectivement en se focalisant sur le caillot, l’équipe ZimGen l’a trouvé : c’est la protéine C autorégulée !

Pierre-Emmanuel Marque étudie le comportement de cette protéine depuis plus de trois ans. Celle-ci est naturellement présente dans notre corps ; elle est activée quand le mécanisme de coagulation se déclenche.
“ La nature est remarquablement bien faite ”, souligne-t-il. “ La thrombine, protéine à l’origine de la cascade d’événements chimiques qui aboutit à la coagulation, se lie avec une autre protéine, la thrombomoduline, à la surface du vaisseau sanguin. L’association des deux molécules active alors la protéine C dont le rôle est de limiter la coagulation dans les micro-vaisseaux, pour qu’ils ne se bouchent pas ”. Malheureusement, cet astucieux mécanisme de régulation n’existe pas dans les gros vaisseaux sanguins ; ceux qui irriguent les organes vitaux comme le cœur !
“ Pour que ces vaisseaux bénéficient des vertus anti-coagulantes de la protéine C, nous l’avons modifiée pour qu’elle s’active automatiquement au terme de la cascade de coagulation. En cas d’accident vasculaire grave, la protéine C chimérique sera administrée en perfusion au patient. Elle deviendra active juste au niveau du caillot, là où la coagulation bat son plein. Elle pourra alors dissoudre le caillot qui bouche le vaisseau sanguin ”.

Particulièrement prometteuse, les propriétés antithrombotiques de la protéine C sont connues depuis près de 20 ans, le concept de l’autorégulation appliquée à cette première protéine constitue une révolution dans les stratégies antithrombotiques.“ Le succès de ce projet tient à une bonne connaissance des besoins du marché pharmaceutique de la thrombose ainsi qu'à la connaissance des mécanismes thrombotiques et de l’évolution technologique ”, précise M. MARQUE. “ Mes études en pharmacie m’ont donné l’occasion de connaître le marché dans le secteur de la santé et des médicaments, alors que l’internat en biologie médicale et mes trois années de thèse m’ont apporté des notions indispensables à la compréhension des mécanismes cellulaires et moléculaires de la coagulation et de la thrombose ”.
Une large expertise qui, confortée par l’esprit d’initiative et la ferme détermination du jeune entrepreneur, a permis de convaincre les premiers collaborateurs, piliers d’une équipe solide et motivée. En même temps, débutait pour lui une étape tout aussi importante et non moins délicate : la recherche de financements et la négociation des premiers partenariats industriels.

Vers d’autres composés antithrombotiques

Révolutionnaire, la protéine C auto-régulée l’est certainement, mais elle ne pourra être utilisée que lorsque le caillot sera formé. C'est pourquoi les activités de ZimGen évoluent aujourd’hui vers la mise en place d’un traitement préventif pour les patients à risque thrombotique, en développant d’autres composés qui empêcheraient la formation des caillots dans les vaisseaux, sans altérer le rôle réparateur de la coagulation.
L’équipe du Dr MARQUE a commencé la traque et a déjà une idée de ce qu’elle peut trouver. Ces composés seront des "empêcheurs d’agréger en cascade" qui, en mimant les zones de contact entre les protéines de la coagulation, vont contrarier les alliances indispensables au mécanisme.
“ Nous commençons par imaginer ces molécules thérapeutiques virtuellement, par conception moléculaire assistée par ordinateur. Elles devraient rejoindre la réalité dans les deux ans à venir… ”, conclut Pierre-Emmanuel MARQUE.

Contact :
ZimGen
Pierre-Emmanuel MARQUE