Novembre 2002 - n°72

La R&D selon l’Institut Français du Pétrole

C’est désormais une collaboration suivie ! La Gazette du Laboratoire se fait en effet régulièrement l’écho des « Carnets de la MET «, comptes-rendus des réunions du Club " Stratégie de Recherche " de la Maison Européenne des Technologies, Université Paris 6.
Favorisant les rencontres de haut niveau et réflexion commune, le Club " Stratégie de Recherche " améliore la collaboration entre les communautés de la recherche publique et privée. Les participants sont des responsables et dirigeants d’entreprises, de laboratoires publics ou de grandes institutions, à l’échelon régional, national ou international. Les personnalités invitées débattent avec les participants des enjeux de la recherche dans le contexte économique actuel et futur. Suivant la nature conférée à la réunion – présentation par un intervenant unique ou table ronde -, la forme pourra varier d’un petit-déjeuner débat de deux heures à une demi-journée de travail.
Parmi la dizaine de rencontres programmées depuis le début 2002, l’une a été consacrée à la stratégie de recherche de l’Institut Français du Pétrole, sous la houlette de M. Edouard FREUND, Directeur Général Adjoint R&D.

Portrait d’un chercheur polytechnicien, au service de l’IFP depuis près de 30 ans

Né le 19 janvier 1947, Edouard FREUND entre à l’Ecole Polytechnique (Promotion 1966) et choisit la " Botte Recherche ". Il est diplômé de l’Imperial College de Londres (DIC) en 1973, puis soutient en 1974 sa thèse d’Etat ès Sciences Physiques au sein de l’Université Paris VI.
C’est également en 1974 que M. FREUND intègre l’Institut Français du Pétrole où il se voit confier plusieurs fonctions successives : ingénieur de recherche au service de Catalyse Hétérogène, Responsable du laboratoire de Microscopie électronique, Chef du département de Physique et Analyse, Directeur de la direction de Recherche Physico-chimique appliquée et Analyse, Directeur adjoint, puis Directeur de l’Objectif Raffinage-Produits… pour aboutir au poste qu’il occupe toujours aujourd’hui : celui de Directeur Général Adjoint de la Recherche et Développement.
Notons que M. Edouard FREUND est l’auteur d’une cinquantaine de publications et que ses travaux sont à l’origine d’une quinzaine de brevets déposés en France et à l’étranger. Parmi ses principaux thèmes de prédilection : la cinétique chimique : pyrolyse des hydrocarbures, la catalyse hétérogène : synthèses à partir de CO + H_, zéolithes, la physico-chimie : caractérisation des solides à l’échelle nanométrique, action d’additifs pour le transport et l’utilisation de produits pétroliers, relations propriétés-structure pour les matériaux polymères, les procédés de raffinage et de pétrochimie, etc.

L’IFP : centre de Recherche et Développement industriel, mais également centre de formation et d’information

" L’Institut Français du Pétrole a été créé en 1943 sous un statut bien particulier ", présente M. Edouard FREUND. " Il s’agit d’un organisme privé ; il ne peut être apparenté ni à un EPIC, ni à un EPTS. Son statut officiel est Organisme Professionnel"
Extrêmement modernes pour leur époque, les statuts d’origine mentionnent que l’IFP a pour objet, en ce qui concerne les hydrocarbures, leurs dérivés et substituts et leur utilisation, de favoriser ou de réaliser les études et les recherches présentant un intérêt pour le développement des connaissances scientifiques et des techniques industrielles. « Il est spécifié qu’une importance particulière doit être donnée à la valorisation du résultat de ces activités, sous toutes ses formes «, poursuit M. FREUND.
Sont également précisées les missions d’information de l’Institut Français du Pétrole (notamment via son Centre de Documentation, aujourd’hui pôle rattaché à la Bibliothèque nationale de France), ainsi que de formation, qui conduira à la création de l’Ecole Nationale Supérieure du Pétrole et des Moteurs (ENSPM).
Les statuts précisent que " la valorisation des travaux de l’IFP peut passer par une prise de participation de l’Institut dans des entreprises industrielles ou commerciales ; ces participations pouvant être détenues par une société créée à cet effet. " définissant ainsi un objet tout à fait d’actualité !
50 ans plus tard, les activités de l’Institut Français du Pétrole couvrent l’ensemble de la chaîne des hydrocarbures, pétrole, gaz naturel et automobile.
" C’est une véritable profession de foi «, déclare M. FREUND. « Notre vocation, c’est d’innover via la R&D et d’assurer le transfert de la technologie et des connaissances pour permettre à la collectivité et à l’industrie des hydrocarbures et de l’automobile une croissance durable et respectueuse de l’environnement… "

12 divisions de R&D et plus de 1800 collaborateurs

277 millions d’euros de budget (en 2002), plus de 1800 personnes dont un grand nombre d’ingénieurs et de docteurs ès sciences, 12 divisions de R&D, environ 200 conventions de recherche avec le monde académique, plus de 15 000 titres de brevets internationaux vivants, soit environ 2000 brevets de base et 150 dépôts de nouveaux brevets tous les ans, etc. : tels sont les chiffres phares de l’Institut Français du Pétrole.
Précisons qu’en tant que centre d’expertise indépendant, l’IFP accorde une attention toute particulière à sa mission de formation. " Environ 400 étudiants, dont la moitié étrangers, sont chaque année diplômés de notre école ", souligne M. Edouard FREUND. " Au total, plus d’une dizaine de milliers d’anciens élèves de l’ENSPM exercent aujourd’hui en France et à l’étranger ; un atout essentiel pour la recherche et pour un certain nombre de développements industriels ! ".
En parallèle de son école d’ingénieurs, l’IFP est un organisme de formation continue, qui accueille une dizaine de milliers de personnes par an dans le domaine des hydrocarbures et de l’automobile. l’IFP est également un pôle de diffusion de connaissances, pôle associé à la Bibliothèque Nationale de France.

Dans l’hexagone, l’IFP se structure autour de trois établissements : le siège social situé en région parisienne, à Rueil Malmaison (92), fort d’un effectif de 1400 personnes, un centre d’études et de développement industriel à Solaize (69), qui regroupe actuellement 400 salariés et devrait être amené à se développer à court terme, et un troisième site de plus petite envergure à Pau (64), né initialement d’une collaboration avec le centre de recherche de ELF.
" L’IFP dispose donc de trois établissements, dont deux majeurs en termes d’effectifs et de volume d’activité : celui de Rueil-Malmaison qui, dans le futur, ciblera principalement les activités de recherche en amont sur les hydrocarbures et l’automobile et celui de Solaize, également centre d’études et de développement, mais davantage orienté sur le raffinage, la pétrochimie et, de manière générale, les procédés… "
D’ici septembre 2003, environ 300 personnes, jusqu’alors basées à Rueil, intégreront le site de Solaize.
Ainsi redistribuée sur le plan géographique, l’activité R&D de l’Institut Français du Pétrole est organisée, non pas par métiers pétroliers, mais par spécialités scientifiques et techniques. Une cinquantaine de domaines de compétences y sont référencés, parmi lesquels la géologie, la géophysique, l’ingénierie de réservoirs, la mécanique appliquée, la catalyse, la chimie et la physico-chimie appliquées, la technologie, le développement des procédés, le génie des procédés, l’informatique, les moteurs, etc.

Que fait-on à l’IFP ?

La sécurité des approvisionnements, impliquant le renouvellement, l’augmentation et la diversification des ressources mondiales d’hydrocarbures et, préoccupation plus récente, le développement durable, figurent au centre des pôles d’intérêt de l’IFP. Des champs d’investigation particulièrement vastes, étudiés à travers des problématiques variées :
- augmenter le taux de succès de l’exploration pétrolière
- accroître le taux de récupération des gisements de pétrole, dans des réservoirs qui, pour la plupart, s’épuisent
- rendre techniquement et économiquement accessibles des pétroles à haut contenu technologique : pétroles extra-lourds et off-shores profonds voire ultra profonds, c’est-à-dire présents dans des fonds marins de 2000 à 3000 mètres ;
- convertir le gaz naturel en produit liquide ;
- réduire l’impact de l’industrie et, plus particulièrement, des produits des hydrocarbures sur l’environnement par le développement des moteurs à combustion interne, la maîtrise des consommations, la limitation des rejets (notamment des gaz à effet de serre et du CO2), l’optimisation des transports ou encore le contrôle de la qualité des carburants…
- mettre au point des technologies propres d’extraction, de transformation et d’utilisation des hydrocarbures ;
- comprendre et estimer quantitativement, grâce à la modélisation, comment s’est constitué le pétrole, comment il s’est déplacé dans les formations géologiques et comment il a atteint ses réservoirs actuels…

" Le plus important, nous explique M. FREUND, c’est d’être tourné vers l’industrie. Notre vocation à servir l’intérêt général via des développements technologiques en phase avec les préoccupations mentionnées précédemment passe en effet par la commercialisation de ces technologies et leur mise en œuvre par l’industrie. "
C’est pourquoi, l’IFP a tissé très tôt des liens étroits et, souvent pérennes, avec les compagnies pétrolières et gazières, la compagnie TotalFinaElf, notamment, mais aussi un grand nombre d’autres groupes internationaux ou nationaux (sociétés para-pétrolières, constructeurs et équipementiers automobiles…).
Précisons que ces sociétés assurent une bonne partie de l’introduction sur le marché industriel des méthodes développées par l’IFP. Comment ? Grâce à la mise en œuvre de prestations de service, la vente de logiciels, de procédés, de brevets ou encore la concession de licences… " Mais ce transfert technologique passe également depuis longtemps par une autre forme de valorisation : la création et le développement d’entreprises ", précise M. FREUND. Citons notamment : PROCATALYSE, COFLEXIP et TECHNIP, ou encore AXENS créée en 2001… et des sociétés plus petites telles que NOVASEP, spécialiste de la séparation...
Des actions réalisées via une holding financière qui, outre sa capacité à faire des investissements industriels, a permis à l’IFP d’affirmer sa position à l’échelle internationale. « Le groupe IFP est ainsi représenté dans toutes les parties du monde : en France, mais aussi à Moscou, au Moyen-Orient, en Extrême-Orient, en Amérique Latine et aux Etats-Unis «, conclut M. Edouard FREUND.