Mai 1997 - n°18

NEUROBIOTEC, Aboutissement de 3 ans de travail et de réflexion pour des chercheurs et cliniciens lyonnais

La structure

Neurobiotec est depuis le 1er Janvier 1997, organisée en Centre de Responsabilité (CR) des Hospices Civils de Lyon, sous la direction d'un chef de service. La conception de cette structure est née au sein de l'Institut fédératif des Neurosciences de Lyon qui regroupe cliniciens de l'Hôpital Neurologique de Lyon et chercheurs INSERM et CNRS en neurobiologie. Le CR est composé de deux unités Fonctionnelles thématiques (UF): l'une chargée plus spécialement de gérer les prélèvements et données cliniques et leur formatage (UF1), l'autre (UF2) chargée de l'exploitation scientifique et médicale de certains de ces prélèvements. Des équipes de recherche regroupant chercheurs et cliniciens constituent cette deuxième unité fonctionnelle. Les responsables de chaque UF forment avec le chef de service, le comité de direction. Un Conseil de coordination scientifique est composé de cliniciens et de chercheurs représentant les disciplines. Les 12membres du conseil sont chargés de veiller à la bonne marche de Neurobiotec et à l'examen des candidatures d'équipes qui désirent accéder à cette structure. Les membres du comité de direction appartiennent au conseil d'administration et sont élus par ce dernier.

L'objectif

Neurobiotec a pour but de mettre à niveau les capacités de recherche préclinique et clinique de l'hôpital neurologique et neurochirurgical Pierre WERTHEIMER de Lyon. Cet hôpital, par sa spécialisation, sa taille et son recrutement, est l'un des plus grands centres mondiaux consacrés à la neurochirurgie et à la neurologie.

Neurobiotec agit selon trois axes :

1/ Création d'une banque biologique couplée à une base de données cliniques. Il s'agit du recueil, du conditionnement, de l'archivage et du stockage ainsi que de la gestion et de l'utilisation des prélèvements biologiques (sang, sérum, liquide céphalo-rachidien, biopsie opératoire, matériel d'autopsie) et des données cliniques provenant des différents services et laboratoires de l'hôpital.

2/ Valorisation de cette "matière première". Pour certains prélèvements biologiques, il est prévu de développer des lignées cellulaires (lymphocytes ou cellules tumorales), extraction d'ARNm, et des banques de cDNA. Ces lignées sont indispensables pour accéder à de nouveaux marqueurs protéiques ou génomiques dans une perspective d'évolution des moyens diagnostiques et de compréhension des mécanismes physiopathologiques. Quant aux banques de cDNA, elles sont à la base des diagnostics de génétique moléculaire pour les maladies du système nerveux.

3/ Création d'un espace de recherche pré-clinique en vue du transfert technologique et de la valorisation des techniques avant leur utilisation clinique. Cela passe naturellement par un renforcement du potentiel technologique des laboratoires existants (laboratoire de Biologie, laboratoire de Neuropathologie qui apportent déjà leur équipement et leur savoir-faire à la structure commune) et par la venue et la création de nouvelles équipes de recherche sur le site de l'hôpital.

L'Unité fonctionnelle 1 est installée dans des locaux de l'hôpital neurologique qui comprennent une pièce pour les congélateurs et les cryoconservateurs avec un système de climatisation, une pièce laboratoire dotée d'une chaîne HPLC, un speed vac, un cytomètre-trieur de cellules, une pièce de culture, un séquenceur d'ADN. Reste à aménager une pièce attenante au bloc opératoire pour le traitement des échantillons.

Deux personnes ont en charge le fonctionnement de la structure. Elles sont chargées 1/ de l'arrivage des prélèvements et des données cliniques, 2/ du formatage de certains de ces prélèvements pour leur typage en cytométrie en flux, la détermination de profils électrophorétiques, la préparation de lignées, le séquençage d'ADN.

L'Unité fonctionnelle 2 comprend plusieurs équipes qui sont d'ores et déjà des partenaires de Neurobiotec, d'autres sont en cours de structuration. A titre indicatif:

* Equipe de Neurogénétique : "Identification et caractérisation de gènes et de mutation dans la maladie de Charcot Marie Tooth (CMT)"

Equipe universitaire dirigée par le Pr A. Vandenberghe et le Pr Chazot

Dans cette maladie, des mutations de trois gènes de la myéline périphérique ont été identifiés et représentent environ 80% des cas. L'objectif est:

a- de poursuivre le criblage des familles qui sont adressées pour la présence de mutation dans les gènes connus,

b- de cribler des gènes candidats de la myéline périphérique pour la présence de mutation,

c- de rechercher des mutations par des méthodes analogues pour d'autres maladies neurologiques.

Cette équipe espère d'une part, apporter un diagnostic fiable pour les familles atteintes, d'autre part établir une relation phénotype-génotype dans l'ensemble des pathologies neuropériphériques. Ce travail propose la continuation des recherches sur le groupe CMT qui est considéré type1, défini par des critères cliniques, mais aussi pour le groupe de CMT dit "intermédiaire" entre CMT type1 et type2 et CMT-like qui représentent plus de la moitié des cas de l'ensemble des prélèvements. Depuis 1990, cette équipe a collectionné une banque d'ADN de patients CMT qui comprend environ 2000échantillons en provenance de 600familles. Cette collection est la plus importante en Europe et probablement au niveau international.

* Equipe de Neurooncologie: "Différenciation des tumeurs primitives neuroectodermiques indifférenciées"

Responsables : N. Thomasset, Unité INSERM 433, A. Jouvet, Hôpital neurologique

Les tumeurs primitives neuroectodermiques touchent essentiellement des enfants et sont fatales pour 30-40% d'entre eux et très invalidantes pour les autres. Les capacités de différenciation de ces cellules tumorales peuvent être mises à profit pour la compréhension de la physiopathologie de ces tumeurs, déterminer des marqueurs pronostiques et trouver de nouvelles alternatives thérapeutiques. Sur des lignées cellulaires établies à partir de tumeurs, cette équipe a développé des modèles de différenciation où sont étudiées:

a- les relations de ces cellules avec leur environnement (molécules de la matrice extracellulaire et leur réponse à des facteurs neurotrophiques),

b- la régulation du cycle cellulaire et l'apoptose,

c- la possibilité de transférer des gènes susceptibles d'induire, soit la mort cellulaire, soit la différenciation.

Ces modèles servent de base à l'analyse phénotypique des tumeurs primitives neuroectodermiques opérées à l'Hôpital Neurologique (prolifération, apoptose, marqueurs de différenciation). Une comparaison est réalisée entre les tumeurs à rechute et les tumeurs sensibles aux traitements en vue de définir des marqueurs pronostiques.

Cette équipe a constitué une banque de tumeurs et de lignées de médulloblastomes qui est une base de choix pour le développement de ces travaux.

* Equipe Sclérose en plaque "Etude épidémiologique de la sclérose en plaque EDMUS (European data base for multiple scléroses)" Programme Biomed

Responsable : Pr Confavreux

L'Hôpital Neurologique possède la base de données sur la sclérose en plaque (SEP) la plus importante au monde par sa taille et sa durée d'existence. L'expérience acquise a permis l'élaboration du système Edmus dans le cadre de l'Action Concertée Européenne contre la SEP. Il s'agit du système standardisé de recueil d'informations européen officiel pour les malades atteints de SEP. Les données recueillies au sein du réseau européen sont centralisées à Lyon. La connexion avec des banques de matériel biologique (sérum, liquide céphalo-rachidien, cellules, tissu cérébral) est en cours. Cette structure anime des activités multicentriques européennes sur l'épidémiologie, l'immunogénétique, l'histoire naturelle, l'apport de l'imagerie par résonance magnétique et les essais thérapeutiques dans la Sclérose en Plaques.

* Equipe "Pathologies dégénératives et syndromes paranéoplasiques"

Responsables : Dr Honnorat, Service de Neurologie (Pr Trouillas), Dr Antoine (Service de Neurologie Hôpital de Saint-Etienne) et Unité433 INSERM

Les syndromes neurologiques paranéoplasiques sont des complications neurologiques qui interviennent dans un contexte de cancer du poumon à petites cellules ou cancer du sein. Des autoanticorps peuvent cibler au sein du système nerveux des protéines et provoquer une pathologie neurodégénérative. Cette équipe a mis en évidence une nouvelle classe d'anticorps qui reconnaissent une protéine (protéine CV2), purifié la protéine, séquencé des peptides, préparé des sondes oligonucléotidiques et cloné le gène.

Elle se propose:

a- de produire de la protéine recombinante pour confirmer la reconnaissance de la protéine par les anticorps et prévoir un test diagnostique,

b- d'étudier le rôle fonctionnel de cette protéine dans des modèles animaux pour comprendre le rôle de cette protéine dans la physiopathologie de ces syndromes,

c- de rechercher son expression dans différentes maladies neurodégénératives.

Cette équipe a ainsi réalisé une banque de sérums de patients atteints de syndromes neurologiques paranéoplasiques (80sérums). Au sein de cette banque, 25sérums originaux contiennent des anticorps contre la protéine CV2 constituant une cohorte unique dans ce domaine.

Neurobiotec -UF1 et UF2- est une structure ouverte sur l'extérieur. Des chercheurs ou industriels n'appartenant pas à l'Institut Fédératif des neurosciences peuvent avoir accès aux prélèvements de l'UF1 ou utiliser les plateaux techniques de l'UF2 après en avoir fait la demande auprès du chef de service du CR et après évaluation par le Conseil de coordination scientifique.

 

B.BOUILLARD