Juin 1997 - n°19

Marseille : l'Institut Fédératif de Recherche - "Physiopathologie Métabolique et Nutritionnelle"

Depuis les années cinquante, Marseille et sa région ont toujours connu une place importante dans les domaines de la biochimie et de la biologie digestives ainsi que du métabolisme. Les travaux, entre autres, du Professeur Pierre Desnuelle sur les enzymes digestives, du Professeur Jean Vague sur l'obésité et du Professeur Henri Sarles en gastro-entérologie ont contribué à affirmer la place de Marseille dans ce secteur de la recherche. Dans la lignée de ce courant scientifique novateur, de nombreuses équipes marseillaises développent aujourd'hui des thématiques diversifiées et complémentaires, d'où le projet de les regrouper au sein d'un IFR.

Pour nous présenter l'IFR "Physiopathologie Métabolique et Nutritionnelle", nous avons rencontré Huguette Lafont, Directeur de l'Unité INSERM U130, coordinateur de l'IFR avec Philippe Vague, Professeur et Chef de service hospitalier. La direction de cet IFR, composée d'un directeur de recherche scientifique et d'un directeur praticien hospitalier, représente les deux orientations de cette structure. En effet, l'IFR "Physiopathologie Métabolique et Nutritionnelle" est tourné vers une recherche fondamentale, appuyée sur des unités INSERM et universitaires, et vers une recherche clinique regroupant trois services hospitalo-universitaires.

Les pathologies métaboliques et nutritionnelles

"La thématique de l'IFR est centrée sur l'étude des anomalies physiopathologiques reliant les nutriments au développement de pathologies humaines", explique Madame Lafont, "c'est une thématique vaste car toutes les perturbations des mécanismes de régulation du métabolisme des nutriments sont abordées. Ces perturbations peuvent engendrer des maladies fréquentes comme l'obésité, le diabète ou l'athérosclérose. La création de l'IFR en1996 a permis de mettre en évidence l'existence sur Marseille de nombreuses équipes impliquées dans cette thématique concrète, mais qui, ne ressortissant pas d'une discipline scientifique ou médicale, n'étaient pas immédiatement perçues comme homogènes par la communauté scientifique, les collectivités et le public".

Les organismes associés dans cet IFR -l'INSERM, l'Université et l'Assistance Publique de Marseille- sont représentés par les équipes et services suivants:

- "Biologie et Physiopathologie de la Fonction Thyroïdienne" (DrJanine Torresani - U38),

- "Transports des Lipides" (DrHuguette Lafont - U130),

- "Physiopathologie des Régulations Hormono-Nutritionnelles" (PrAndré Gérolami - U260),

- "Fibrinolyse et Pathologie Vasculaire" (PrIrène Juhan-Vague - CJF93-12),

- "Etiopathogénie des Maladies de la Paroi Vasculaire" (PrPH. Rolland - CJF94-01) / "Etiopathologie des Maladies Vasculaires" (PrJosé Sampol - EA2195),

- "Physiopathologie Clinique et Moléculaire du Pancréas Endocrine et Exocrine" (PrBernard Vialettes et DrCatherine Figarella - EA2193).

Soit au total près de 130 personnes dont environ 70chercheurs ou enseignants-chercheurs.

Sont associés à ces laboratoires de recherche les services cliniques de Nutrition-Maladies métaboliques-Endocrinologie (Hôpital de la Timone - PrPhilippe Vague et Hôpital Sainte-Marguerite - PrBernard Vialettes) et d'Hépato-Gastroentérologie (Hôpital de la Conception - PrAndré Gauthier). L'IFR compte aussi une équipe collaboratrice CNRS intitulée "Biochimie des Systèmes enzymatiques" (PrCatherine Chapus).

La majorité des équipes constitutives de l'IFR sont implantées sur le site de la Timone entre la faculté de Pharmacie, de Médecine et l'Hôpital.

L'officialisation de cette thématique de recherche sur la Physiopathologie Métabolique et Nutritionnelle a permis de formuler des demandes concrètes de financement auprès des collectivités territoriales. La région a apporté une contribution de 600KF permettant l'achat de matériels d'équipement communs destinés à la clinique (deux calorimètres indirects) et à l'analytique (un appareil de comptage radioactif TOPCOUNT).

Les axes de recherche fédérateurs

Les déviations des voies métaboliques sont à peu près connues, l'effort des différents partenaires de l'IFR se porte principalement sur les origines des maladies métaboliques et nutritionnelles (interactions entre prédispositions génétiques et facteurs environnementaux) et leurs développements. Trois axes principaux de recherche fédèrent l'activité de l'IFR, ils sont intimement liés et parfaitement complémentaires.

Le premier thème concerne la régulation du métabolisme des nutriments et en particulier des lipides. L'objectif de l'IFR vise à analyser les aspects les plus fondamentaux du métabolisme lipidique et de sa régulation permettant d'obtenir un équilibre entre lipogenèse et lipolyse. De tels travaux ont des retombées en recherche clinique tant chez l'homme sain que chez les patients présentant des pathologies en relation directe avec le métabolisme des lipides ou plus largement des maladies à implication nutritionnelle (diabète, mucoviscidose, athérosclérose, obésité, steatase hepatique et cholestase). Le second axe de recherche consiste en l'étude du pancréas et de la thyroïde, deux organes impliqués dans les régulations métaboliques par leurs sécrétions. L'axe vasculaire est le troisième et dernier grand thème de recherche et il est directement lié aux sujets précédents.

La 1èrejournée de l'IFR qui aura lieu le 27juin1997 au sein de la Faculté de Médecine de la Timone sera l'occasion pour les chercheurs des différentes équipes de communiquer sur tous ces thèmes de recherche communs.

Les thématiques de l'IFR intéressent le développement économique régional par une reconnaissance des bienfaits de l'alimentation méditerranéenne. Commun à tout le bassin méditerranéen, ce type d'alimentation se caractérise par un apport important de céréales et légumineuses, de fruits et légumes frais, de lipides monoinsaturés (huile d'olive), un apport modéré et régulier de vins, un apport faible de beurre et lipides saturés et une consommation d'ail et d'oignon. Ces particularités pourraient expliquer les données épidémiologiques montrant une moindre fréquence des maladies cardio-vasculaires dans les régions méditerranéennes et ce malgré un taux de cholestérol sanguin identique à celui de pays voisins. De traditionnel, ce type d'alimentation est devenu un modèle dont les intérêts vis-à-vis de la santé ont commencé à être établis scientifiquement. Le rôle biologique des différents groupes d'aliments concernés et des nutriments qu'ils contiennent doit être étudié plus précisément. Des projets de recherche sont en cours dans ce domaine et s'appuient sur les PME et PMI de la région.

 

V. CROCHET