Décembre 1997 - n°23

L'Unité de Neurogénétique Moléculaire de Lyon

Depuis 1991, le laboratoire de Neurogénétique Moléculaire est installé dans les locaux du laboratoire de Biochimie centrale du Professeur Boucherat situé à l'hôpital de l'Antiquaille à Lyon. Cette unité, dirigée par le Professeur Vandenberghe, travaille sur les neuropathies héréditaires motrices et sensitives. La maladie de CHARCOT-MARIE-TOOTH (CMT), maladie neuromusculaire du système nerveux périphérique, représente le thème d'étude principal. La recherche fondamentale concernant la CMT et le développement des techniques de diagnostic de cette maladie sont les principaux objectifs de cette unité.

Le système nerveux est divisé en système nerveux central et en système nerveux périphérique. Le cerveau et la moëlle épinière forment le système nerveux central. Le système nerveux périphérique se compose de fibres nerveuses qui relient le système nerveux central à la périphérie; il comprend les fibres nerveuses qui partent de la moëlle épinière et qui vont jusqu'aux muscles (fibres motrices) ainsi que les fibres qui viennent des organes sensoriels, par exemple la peau, et vont à la moëlle épinière (fibres sensitives).

Sous le terme de la maladie neuromusculaire, on regroupe toutes les affections qui atteignent les cellules et les fibres du système nerveux périphérique qui atteignent les muscles ou enfin qui touchent la jonction entre les fibres nerveuses et les fibres musculaires.

L'expression clinique de la maladie de CHARCOT-MARIE-TOOTH

Il faut savoir qu'il existe plusieurs types de maladie de Charcot-Marie-Tooth. C'est la maladie la plus fréquente des maladies sensitivo-motrices héréditaires. Le moment où apparaissent les premiers symptômes est très variable d'un patient à un autre et pour chaque type de CMT. Il est difficile de donner une description complète de la maladie. Ceci est dû à l'existence d'une grande variation clinique d'un patient à l'autre pour un même type génétique de CMT. Cependant, quel que soit l'âge, les anomalies vont d'abord concerner les parties du corps les plus distales, les pieds et les orteils. Si la maladie évolue, l'atteinte touchera les muscles de la partie antérieure et externe de la jambe, parfois les mains. Dans certains cas, les muscles des cuisses, des épaules, du dos pourront être touchés ultérieurement. Dans tous les cas, la maladie évolue lentement, de façon progressive sur des années, voire pas du tout. Quelque soit la partie du corps qui est touchée, cette atteinte est toujours symétrique.

Comme la plupart des affections neuromusculaires, en particulier héréditaires, la guérison de la maladie de Charcot-Marie-Tooth n'est actuellement pas envisageable. Néanmoins, les recherches sont en cours.

La génétique moléculaire appliquée à la maladie de CHARCOT-MARIE-TOOTH

L'approche génétique oblige le laboratoire à avoir une collaboration étroite avec un grand nombre de familles atteintes de la CMT. En effet grâce à l'existence et à la collaboration de grandes familles dans lesquelles la maladie s'est transmise génétiquement, ce laboratoire a mis en place et utilisé la stratégie de la génétique inverse pour dépister la mutation fondamentale qui est à la base de la maladie. La génétique inverse désigne l'identification directe de gènes impliqués dans une maladie héréditaire dont la protéine défectueuse est inconnue. Cette opération consiste à repérer, au niveau du locus morbide considéré, des séquences génomiques exprimées, à les déchiffrer et à en déduire la séquence polypeptidique correspondante. Il faut savoir qu'il existe différentes formes génétiques de CMT. La CMT de type1a, caractérisée par une diminution de vitesse de conduction nerveuse est une maladie autosomique dominante; elle est associée à une duplication chromosomique de la région 17p11.2 d'environ 1.5mégabases. Cette duplication se produit dans la région du gène codant pour la protéine PMP-22 de la myéline périphérique. Cette trisomie partielle du chromosome 17 suggère un "surdosage génétique". Dans 10% des familles de CMT1 étudiées dans ce laboratoire, on observe des néomutations qui sont dans la plupart des cas d'origine paternelle. La CMT de type1b, est elle aussi caractérisée par une diminution importante de la vitesse de conduction motrice du nerf médian. Le laboratoire de neurogénétique moléculaire de Lyon a localisé le gène de la protéine Po qui est impliquée dans la CMT1b.

La protéine Po

Le gène de la protéine Po ou "Myelin protein zero" (MPZ) a été localisé dans la région 1q22-23. C'est la principale protéine de la myéline périphérique; c'est une protéine d'adhérence, qui fait partie de la membrane et qui est responsable de l'adhésion et de la compactation des couches de myéline. Le domaine extracellulaire de Po ressemble au domaine variable d'une immunoglobuline. Plusieurs mutations de ce gène, qui provoquent la forme CMT1b, ont été rapportées par le laboratoire.

De nombreux travaux sont encore à réaliser concernant les maladies de Charcot-Marie-Tooth. Le laboratoire de neurogénétique moléculaire de Lyon participe activement à ces travaux.

 

C.VOLAND