Janvier 1998 - n°24

Remise des Prix SFBC et BIOMERIEUX 1997

Le 27 novembre 1997, à l'occasion des Journées Scientifiques organisées par le Comité d'Interface INSERM / SFBC, les Prix bioMérieux et SFBC ont été remis aux trois lauréats couronnés cette année.

Le Prix bioMérieux "Diagnostic biologique des maladies neurodégénératives"

D'une valeur de 40000F., le Prix bioMérieux est décerné tous les deux ans; il est destiné à récompenser des travaux de recherche dans le domaine des maladies neurodégénératives, ouvrant la voie à des développements diagnostiques, mais aussi thérapeutiques.

Remis par M.MANDRAND -Directeur de l'Unité Mixte CNRS / bioMérieux-, le Prix bioMérieux1997 a été attribué à:

- Mme Nicole BAUMANN -Directeur de Recherches INSERM, U134, Paris-, pour l'ensemble de ses travaux sur les maladies d'origine génétique du système nerveux central,

- M. Frédéric CHECLER -Directeur de Recherches INSERM, Institut de Pharmacologie Moléculaire et Cellulaire, Sophia Antipolis-, pour son étude sur la maladie d'Alzheimer.

* Les maladies neurodégénératives de l'adulte liées à des erreurs innées du métabolisme des lipides: développement de la stratégie diagnostique et étude des relations génotype-phénotype

"Les maladies génétiques, caractérisées par des anomalies du catabolisme ou du transport des lipides, sont classiquement considérées comme des maladies de l'enfant. Elles peuvent pourtant se révéler de façon tardive, chez l'adolescent ou l'adulte jeune, avec une symptomatologie évocatrice de maladies neurodégénératives", explique Mme BAUMANN. "Cette constatation a motivé la création d'une unité d'investigations diagnostiques, destinée à l'étude de ces maladies neurométaboliques de l'adulte jeune".

Implanté à Paris, sur le site de l'Hôpital Pitié Salpétrière, ce laboratoire se distingue par une double vocation de recherche, à la fois clinique et biologique.

Un progrès considérable a été enregistré ces dix dernières années en terme de stratégie diagnostique pour l'ensemble de ces maladies.

Dans la plupart des cas étudiés, les relations génotype-phénotype s'avèrent, en revanche, plus difficiles à établir. "Dans le cas parti-culier de la leucodystrophie métachromatique à formes motrices, précise Mme BAUMANN, ...une relation génotype-phénotype a été cependant clairement établie par la mise en évidence d'une mutation caractéristique de ces formes".

L'étude de maladies métaboliques à expression neurodégénérative de l'adulte jeune représente un enjeu capital en terme de Santé Publique.

Le développement d'unestratégie adaptéepermet d'identifierles syndromes neurologiques, d'établir des liens entre maladies métaboliqueset manifestationspsychiatriques, et de mieux comprendre la physiopathologie desmécanismes neurodégénératifs.

"La création d'un réseau d'études en partenariat avec les services de psy-chiatriefrançais permettrait d'élargir notre champ d'investigation et de diagnostic", souligne MmeBAUMANN. "Cependant, la finalité ultime de ces travaux est d'améliorer la prise en charge de ces maladies orphelines, trop souvent méconnues et sous-diagnostiquées, et pour lesquelles le conseil génétique, seul recours préventif actuel, s'avère indispensable...".

* L'étude des secrétases dans la physiopathologie de la maladie d'Alzheimer

Deux anomalies anatomopathologiques du tissu cérébral caractérisent la maladie d'Alzheimer: l'altération du cytosquelette, traduite principalement par une dégénérescence neurofibrillaire, et l'apparition de plaques séniles, c'est-à-dire le développement de lésions extracellulaires, organisées autour d'un noyau de substance amyloïde.

La protéine Aß, issue de la protéolyse d'une autre protéine -la ßAPP-, constitue la part essentielle de cette substance amyloïde.

Par ailleurs, comme l'ajoute M.CHECLER, "La majorité des formes familiales précoces de la maladie d'Alzheimer sont corrélées à l'expression de gènes dont les loci sont portés par les chromosomes14 et1. Ces gènes ont été récemment identifiés; ils codent pour deux protéines appelées préséniline1 (PS1) et pré-séniline 2(PS2)".

M. CHECLER et son équipe se sont donc intéressés, plus directement, à préciser la fonction des présénilines et à élucider les mécanismes protéolytiques responsables des coupures physiologiques (libératrices de ßAPP) ou pathologiques (libératrices de Aß).

"Pour mener à bien nos travaux, précise M.CHECLER, nous avons dû développer toute une série d'outils spécifiques, en particulier des anticorps polyclonaux anti Aß. Ces anticorps sont désormais largement utilisés dans le monde entier, aussi bien comme des outils de recherche que comme des aides au diagnostic post- mortem de la maladie d'Alzheimer".

Parmi les principaux acquis scientifiques du laboratoire, nous citerons notamment ceux concernant la voie *-secrétase, cette protéase qui clive la ßAPP au milieu de la séquence caractéristique de la Aß, prévenant ainsi l'amyloïdogénèse responsable de la formation des plaques séniles.

"La voie *-secrétase est en réalité sous le double contrôle des protéines kinases -en particulier la protéine kinasea-, et d'une enzyme, le protéasome, modulant la maturation physiopathologique de la ßAPP via le contrôle de la dégradation des présénilines...".

Le Prix International SFBC 1997

Le Prix SFBC, d'un montant de 20000F., est décerné tous les ans. Il a été remis cette année par le PrJARDILLIER -Président de la SFBC- à M.Bernard ARAL, assistant hospitalo-universitaire du laboratoire de Biochimie B, Hôpital Necker-Enfants Malades, et de l'unité CNRS URA 1335.

Ces deux laboratoires, auxquels appartient le DrARAL, ont développé des activités biochimiques spécialisées (cycle de l'urée, métabolisme des purines...) et réalisé des études plus spécifiques de relation génotype-phénotype.

"Les explorations biochimiques spécialisées ont notamment porté sur des descriptions de maladies héréditaires rares du métabolisme elles nous ont notamment permis de désigner des enzymes ou protéines cibles dont le déficit génétique était fortement suspecté dans la pathogénèse d'un certain nombre de phénotypes biochimiques et cliniques", nous explique M.ARAL."Les gènes codant pour ces protéines ou enzymes déficitaires n'avaient pas encore été cloné chez l'Homme; nous avons donc appliqué le concept de "transfert d'homologie" au clonage sur base de données de ces gènes, à partir des informations biologiques et génétiques déjà connues au niveau des gènes homologues chez la levure".

En utilisant ce schéma d'approche, le DrARAL et son équipe ont ainsi pu identifier plusieurs gènes humains; nous citerons notamment celui codant pour la sous-unitéX du complexe enzymatique "pyruvate déshydrogénase" dont le déficit est responsable des acidoses lactiques néonatales.

Couronnés dans le cadre de la journée conjointe SFBC-INSERM, les trois lauréats ont ainsi exposé, devant plus de 250participants, la nature de leurs travaux, leurs premiers résultats scientifiques ainsi que leurs projets à plus ou moins long terme.

 

S.DENIS