Mai 1998 - n°28

INSERM 387 : adhésion cellulaire

Ce laboratoire se consacre à l'étude de l'adhésion cellulaire, phénomène ubiquitaire en médecine et en biologie, à partir de plusieurs approches : la base de l'adhésion, sa dynamique et les interactions occasionnées au cours du phénomène.

Situé à l'intérieur de l'hôpital Sainte Marguerite (Marseille), ce laboratoire est à la fois une unité INSERM 387, adhésion cellulaire (ouverte en 1994) et un laboratoire hospitalier d'immunologie rattaché à la faculté de médecine (université de la Méditerranée, ouvert en 1976). Son originalité provient du regroupement sur un même site d'un laboratoire hospitalier et d'une unité de recherche. Cette spécificité permet une meilleure efficacité, un gain de temps (moins de déplacement) et une double utilisation des appareils.

Le laboratoire est scindé en trois équipes :

1- Etude dynamique de l'adhésion (P. Bongrand)

L'originalité de ce travail relève de son approche biophysique. Trois études sont en cours :

- Etude des interactions entre molécules d'adhésion liées à des surfaces (cinétiques d'association et de dissociation dans une chambre à flux laminaire)

- Etude du contrôle du cytosquelette. Actuellement, l'équipe s'intéresse au rôle du calcium dans le contrôle de la forme et de la rigidité cellulaire (étude des propriétés mécaniques)

- Etude du rôle du glycocalyx dans l'adhésion.

L'adhésion s'avère un phénomène primordial car il guide le comportement des cellules. Son étude revêt ainsi un caractère de première envergure. " En biochimie, bien que l'on ait déjà effectué des mesures d'association de molécules en solution (constante d'affinité, de dissociation...), on ne peut pas prédire comment des molécules, liées à des membranes, vont se comporter. Les notions utilisables pour décrire le comportement des molécules à trois dimensions n'ont plus de sens sur une surface car d'autres paramètres interviennent (flexibilité de la molécule, longueur...). Nous nous proposons de trouver un mode exhaustif de description du comportement de molécules liées à des surfaces.

D'une part, notre ambition est de mesurer la durée de vie des liaisons et la dépendance de cette durée de vie vis-à-vis des forces appliquées du système extérieur. Parmi plusieurs approches possibles pour cette étude, l'équipe a choisi la chambre de flux. Nous avons déjà obtenu des résultats. En effet, nous sommes le premier laboratoire à avoir mesuré la durée de vie de la liaison des sélectines (molécules qui interviennent dans l'interaction de l'endothélium et des cellules circulantes). Nous espérons avoir des réponses plus complètes dans les deux années à venir.

D'autre part, on s'aperçoit qu'il existe des états d'adhésion intermédiaires entre la molécule attachée ou non. Une fois la première liaison formée, comment la cellule continue-t-elle à s'attacher ? Comment la cellule contrôle la forme du cytosquelette ? On sait que cette forme et l'organisation du cytosquelette sont guidées par une centaine de molécules liées à l'actine, elles-mêmes contrôlées par des phénomènes transitoires (flux de calcium...). Nous accumulons des données dans le but d'en faire une synthèse.

Parmi deux approches possibles, biochimique (à partir de systèmes reconstitués) et biocellulaire (à partir de l'analyse de la réponse à une perturbation de la cellule), nous avons choisi la seconde qui nous semblait plus pertinente.

De plus, il faut avoir des méthodes d'analyses locales ayant une bonne résolution temporelle (de l'ordre de la milliseconde). Pour cela, l'équipe a développé des techniques d'analyse d'images et de micromanipulations adaptées à l'étude du comportement de la cellule. Le but ultime étant de faire un modèle moléculaire du fonctionnement cellulaire " déclare le Pr. Pierre Bongrand, directeur de l'INSERM 387.

2- interaction leucocytes endothélium et pathologies (responsable S. Kaplanski)

Cette équipe se consacre à l'étude de l'interaction des lymphocytes, monocytes et cellules endothéliales et aux phénomènes d'activation qui se traduissent par la production de cytokines et de molécules d'adhésions. Ce phénomène constitue la base de la réaction inflammatoire. Or ce type de réaction s'avère ubiquitaire en médecine puisqu'il concerne les maladies allergiques, auto-immunes, toutes les infections (les fièvres..), les maladies articulaires avec composante inflammatoire.

Dans les principales pathologies (maladies cardio-vasculaires, cancers et infections), la composante inflammatoire est présente. " En effet, il est supposé qu'une inflammation locale pourrait favoriser la formation de métastases. Est-ce qu'une métastase se forme n'importe où, uniquement en aval de la tumeur ou bien peut-elle parcourir l'organisme et s'attacher là où certaines conditions sont remplies ? Le côté banal anatomique n'est pas suffisant pour tout expliquer, le côté inflammatoire joue un rôle.

Dans les maladies cardio-vasculaires, une composante inflammatoire est présente mais souvent discutée. La plaque d'athérome, en particulier les macrophages associés doivent s'activer et libérer certainement des cytokines qui interviennent dans le développement de la maladie " déclare P. Bongrand.

Ce groupe réalise des études dans un grand nombre de domaines. Par exemple, l'équipe a montré récemment que la thrombine (qui intervient dans le phénomène de coagulation) induisait une réaction endothéliale relativement complète contrairement à ce que l'on pensait auparavant. Ce groupe s'intéresse également au rôle des molécules d'adhésion dans l'activation des cellules endothéliales par les monocytes.

Le rapprochement avec les problèmes médicaux est facilité par la présence dans le groupe d'un immunologiste clinicien.

3- bases moléculaires de l'adhésion (responsable JC. Lissitzky)

Cette équipe s'intéresse essentiellement aux comportements des intégrines dans l'adhésion et la migration cellulaire, et à leur régulation par les protéines kinase-C. L'équipe travaille actuellement sur les kératinocytes et sur la relation adhésion - migration car cette dernière intervient dans de nombreux cas en médecine, comme pour le cancer et pour les phénomènes de cicatrisation.

L'équipe essaie de déterminer quelles sont les mécanismes biochimiques de contrôle qui régulent la migration et l'interaction de la cellule avec son substrat (les conséquences de l'adhésion sont l'étalement, la différenciation...). Les phénomènes d'attachement et de détachement contrôlés de la cellule mettent en jeu les molécules d'adhésion, le cytosquelette et les microfilaments d'actine.

Le laboratoire comprend une trentaine de personnes relevant pour part égale du milieu hospitalier et de le recherche pure.

Outre les outils usuels de biochimie et de radioactivité, l'INSERM 387 bénéficie de machines plus performantes dans les mesures de fluorescence (cytométre en flux, microscope confocal à laser et plusieurs systèmes d'analyses d'images de microscopie à fluorescence). Les chambres d'adhésion à flux laminaires constituent une spécificité du laboratoire.

Le financement se partage en fonds INSERM et en appels d'offres nationaux et en contrats privés.

Ce laboratoire entretient de nombreux échanges scientifiques avec l'étranger. " Il maintient une collaboration active avec le Pr. Dinarello (Denver) et le Dr. Van Der Merwe (Oxford) " déclare P. Bongrand.

J. SILVY