Mars 1999 - n°36

Université de la Méditerranée (Aix-Marseille II)

Gros plan sur: Le service commun "Biocapteur optique"

Le service commun "Biocapteur optique" de l'Université de la Méditerranée, installé dans les locaux de la Faculté de pharmacie, est ouvert depuis le 2 mai 1997. Il dispose d'un appareil IAsys auto + automatisé, "cet appareil est à notre connaissance le seul installé en France alors que son implantation sur le marché européen est par ailleurs déjà bien établie" explique Madeleine Bourdeaux, Professeur à l'Université de la Méditerranée et responsable de ce service qui dispose également d'un certain nombre d'équipements indispensables au bon fonctionnement autonome de la structure : hotte à flux laminaire, incubateur à CO2, centrifugeuse réfrigérée, bain-marie et réfrigérateur. Le biocapteur optique a été acquis grâce aux dotations du MNERT et du Conseil Général tandis que l'installation du local et les équipements complémentaires ont été financés par des crédits du BQR UFR de Pharmacie et de l'Université de la Méditerranée.

Le biocapteur optique, un outil de choix pour l'étude des interactions moléculaires

Mesures en continu, absence de marquage des molécules... l'utilisation d'un biocapteur optique pour l'étude des interactions entre biomolécules présente de nombreux avantages par rapport aux méthodes traditionnelles. L'appareil disponible à la Faculté de Pharmacie permet d'étudier les interactions de biomolécules en solution mais aussi intégrées dans leur contexte physiologique (membranes, organites cellulaires et même cellules). Son champ d'application est donc très étendu et permet la visualisation de multiples interactions équilibrées ou même covalentes entre deux partenaires, ligand et analyte, dont l'un -au moins- a une masse moléculaire supérieure à environ 1000 Daltons. Les informations obtenues sont fonction du problème envisagé et vont de la reconnaissance moléculaire au dosage en passant par l'étude de la stœchiométrie ou de la cinétique d'une réaction.

Principe général d'un biocapteur optique

La fixation de l'analyte sur le ligand -retenu de manière spécifique sur une matrice- donne un signal qui est recueilli et analysé. On parle de biocapteur optique car la méthode de transduction utilisée est optique. Le principe de détection du biocapteur optique du service est celui du Miroir Résonant (il existe un autre type de biocapteur optique basé sur la détection par Résonance Plasmonique de Surface).

Principe de la détection par Miroir Résonant

Un laser fournit un faisceau de lumière polarisée monochromatique qui vient illuminer un guide d'onde constitué d'une bi-couche de titane et de silice. Le système de détection optique de l'appareil est calibré pour que le faisceau lumineux soit entièrement réfléchi ; seule l'onde évanescente (une des composantes électromagnétiques de la lumière) pénètre dans l'échantillon sur une profondeur maximale de 300 nm, c'est-à-dire dans la zone où ont lieu les interactions moléculaires entre le ligand retenu sur la matrice et l'analyte en solution. L'onde évanescente est transmise sur toute la longueur de la structure résonante avant d'être réfléchie. L'analyseur en fin de chaîne mesure des variations d'angle de résonance -induits par l'association ou la dissociation des complexes moléculaires- sous l'apparition d'un pic lumineux ; l'enregistrement de ce signal s'appelle un sensorgramme.

Le choix des matrices

Les matrices (sur lesquelles sont fixés les ligands) généralement utilisées sont des matrices tridimensionnelles à base de dextran. Le biocapteur optique IAsys auto+ propose également des surfaces bioréactives à base de silane qui présentent l'avantage d'être planes et donc de limiter les encombrements à l'interface matrice/échantillon. Le carboxy-méthyl dextran et le silane carboxylate sont des surfaces qui conviennent à l'étude de molécules hydrosolubles dans un milieu hydrophile. D'autres supports permettent de lier spécifiquement des molécules biotinylées, des molécules avec groupement amino, des composés hydrophobes... Le choix dans les surfaces bioréactives est donc vaste et permet d'envisager de nombreuses études même sur des macromolécules intégrées dans des structures physiologiques ou artificielles volumineuses et/ou hydrophobes.

Les applications du biocapteur optique

Antigène-anticorps, hormone-récepteur, médicament-récepteur, enzyme- (substrat ou cofacteur ou inhibiteur), ADN-ADN, ADN-protéine, ligand-(microorganisme ou vésicule ou organite cellulaire ou cellule), toutes ces interactions peuvent être réalisées au sein du biocapteur optique pour de multiples observations : reconnaissance moléculaire, calcul de concentration ou étude de la cinétique de réaction (constantes d'affinité, d'association, de dissociation...). Madeleine Bourdeaux insiste néanmoins sur le fait que même si le dispositif avec son système de cuves interchangeables se prête tout à fait à une multi-utilisation, il convient de prendre conscience que cette technique de pointe ne peut se mettre en œuvre sans l'apport d'une compétence éprouvée dans le domaine des biocapteurs optiques.

Après une étude sérieuse sur la faisabilité des expérimentations par biocapteur optique, des travaux ont déjà été réalisés dans le cadre de recherches sur la biosynthèse des hormones thyroïdiennes et dans le domaine de l'adhésion cellulaire. D'autres sujets d'études sont programmés, ils concernent la nutrition, la biogénotoxicologie et la cancérologie.

"L'apport scientifique et technique du biocapteur optique est très intéressant pour de nombreux axes de recherches prioritaires présents à l'Université de la Méditerranée comme l'environnement, la génétique, l'immunologie, la cancérologie, la microbiologie, les pathologies transmissibles ou la nutrition" confirme Madeleine Bourdeaux, "ainsi l'Université de la Méditerranée dispose d'un service performant et utile pour la recherche mais aussi la formation à la recherche".

La structure mise en place à l'Université de la Méditerranée est bien sûr accessible aux industriels.

V. CROCHET