Janvier 2000 - n°44

Un nouveau procédé de dénitratation des eaux

Fruit d'une coopération réussie entre un laboratoire mixte CNRS - Université Montpellier 2 - Ecole Nationale Supérieure de Chimie de Montpellier et la société EURODIA, le nouveau procédé associe l'extraction des nitrates par électrodialyse et leur destruction par voie microbiologique au moyen d'un réacteur à membrane.

Le nitrate est transformé par le corps humain en différents composés azotés (nitrites, nitrosamines...) néfastes pour la santé. C'est pourquoi la loi française limite à 50 mg/l la teneur en nitrate dans les eaux potables tandis que l'Union Européenne recommande un taux plus faible de 25 mg/l. Le respect de ces concentrations limites est un souci majeur dans certaines régions où l'emploi d'engrais et l'épandage de lisiers ont provoqué une augmentation de la teneur en nitrate dans les eaux naturelles utilisées pour produire l'eau potable.

A la recherche d'une technique performante de dénitratation des eaux ...

Pour éliminer les nitrates, différents procédés existent -échange d'ions, osmose inverse, électrodialyse et destruction biologique- mais aucun n'est réellement satisfaisant en terme d'efficacité, de faisabilité ou de coût. Les méthodes physico-chimiques présentent l'inconvénient de déplacer la pollution. L'échange d'ions par exemple introduit des chlorures dans l'eau et nécessite une phase de régénération source de rejets salins concentrés. Quant à l'électrodialyse, elle n'introduit pas d'autres ions dans l'eau mais produit un concentrât de nitrates qui doit être traité. Seule la voie biologique présente l'avantage de détruire le polluant en le transformant en azote gazeux mais sa mise en œuvre est délicate au sein d'une station d'eau potable. Une technique performante de dénitratation des eaux reste donc à mettre au point et c'est dans ce contexte qu'interviennent les recherches menées conjointement par la société française Eurodia -leader européen de l'électrodialyse- et le Laboratoire des matériaux et procédés membranaires, unité mixte de recherche CNRS, Université de Montpellier 2 et Ecole Nationale Supérieure de Chimie de Montpellier. Le nouveau procédé de dénitratation des eaux potables développé au terme de ce programme de recherche -soutenu par le Ministère de l'Education Nationale, de la Recherche et de la Technologie (Département "Biotechnologies")- associe l'extraction des nitrates par électrodialyse et leur destruction biologique au moyen d'un bioréacteur à membrane. Dans un premier temps, le traitement par électrodialyse fournit une eau potable avec une teneur en nitrate résiduelle largement inférieure à 20 mg/l puis, dans un second temps, le concentrât de nitrates obtenu est traité par un consortium bactérien au sein d'un bioréacteur à membrane. Dans le rejet final à la sortie du bioréacteur, la concentration en nitrate est nulle et la DCO -révélatrice d'une pollution par de la matière organique- reste très inférieure à la norme autorisée. Grâce au couplage des deux technologies, l'apport de matière organique nécessaire au maintien de la biomasse ne concerne pas l'eau traitée mais uniquement le circuit annexe où sont collectés les nitrates extraits pour y être dégradés par les bactéries. Ce procédé conserve de plus toute son efficacité quelles que soient les caractéristiques de l'eau à traiter : teneur en nitrate initiale, débit et température. Son application peut donc être envisagée indifféremment au sein de petites communes ou de très grands centres de traitement des eaux. Le programme de recherche a duré 18 mois et s'est terminé par 5 mois d'expérimentation pilote au sein du lycée d'enseignement technologique et agricole du Gard à Rodilhan dans le cadre de la filière "Gestion et maîtrise de l'eau". L'essai a permis de contrôler la fiabilité du procédé et de mieux cerner le coût économique. La partie recherche et développement est aujourd'hui terminée et la société Eurodia poursuit des études complémentaires nécessaires à la commercialisation de ce nouveau procédé qui marque une avancée technique dans le domaine de la dénitratation des eaux potables.

V. CROCHET

Contact:

Claude GAVACH

Laboratoire des matériaux et procédés membranaires