Octobre 2001 - n°61

Le Club Stratégie de Recherche de la MET donne la parole à Alain COSTES, Directeur de la Technologie au Ministère de la Recherche

Dans le cadre d'une conférence organisée par le Club Stratégie de Recherche de la MET (Maison Européenne des Technologies, Université Pierre et Marie Curie), le Professeur Alain COSTES - Directeur de la Technologie au Ministère de la Recherche - s'est exprimé sur la politique d'innovation conduite par son Ministère. M. Hubert CURIEN, modérateur de la réunion, invite Alain COSTES à développer sa présentation, puis coordonne le débat qui suit.

PORTRAIT

Ingénieur ENSEEIHT en 1963, Alain COSTES soutient sa thèse de 3ème cycle en 1966, puis sa thèse d'Etat en 1972.

Directeur du Laboratoire CNRS d'Analyse et d'Architecture des Systèmes / LAAS à Toulouse de 1984 à 1996, il devient Président de l'Institut National Polytechnique de Toulouse en 1996, présidence qu'il quitte en octobre 2000 pour prendre les fonctions de Directeur de la Technologie au Ministère de la Recherche.

Notons, en outre, parmi plusieurs autres de ses responsabilités, que le Professeur Alain COSTES est aujourd'hui membre de l'Académie des Technologies et Président du Comité d'Orientation de l'ANVAR Midi-Pyrénées. Il est, par ailleurs, Officier des Palmes Académiques et Officier de la Légion d'Honneur.

"Je vais vous présenter de manière synthétique les principales missions de la Direction de la Technologie au sein du Ministère de la Recherche", commence M. COSTES. "Mon exposé s'articule autour de cinq thèmes qui me paraissent essentiels : la Loi sur l'Innovation et la recherche, les actions du Ministère en matière de création d'entreprises, le partenariat technologique, l'insertion des jeunes diplômés dans la vie économique et, enfin, la coopération européenne communautaire et internationale".

A propos de la Loi sur l'Innovation…

Parue au Journal Officiel du 12 juillet 1999, la Loi sur l'Innovation compte trois grandes lignes directrices:

- l'incitation à la mobilité et à la création d'entreprise par les personnels du secteur de la recherche ;

- le développement des collaborations entre les organismes de recherche, les établissements d'enseignement supérieur et les entreprises (qu'il s'agisse de grands groupes, de PME/PMI ou de sociétés de services) ;

- la mise en place de mesures fiscales favorables aux entreprises innovantes.

L'une des avancées majeures pour les personnels de recherche (chercheurs, enseignants-chercheurs des établissements universitaires et ingénieurs) réside dans l'opportunité de créer des entreprises en concertation avec leur laboratoire, d'apporter leur concours scientifique ou technique, ou d'être actionnaires d'une entreprise qui valorise leurs travaux. Désormais, ils peuvent également siéger au Conseil d'Administration d'une entreprise en Société Anonyme.

A noter qu'il existe dans les établissements d'enseignement supérieur et les EPST (Etablissements Publics Scientifiques et Techniques) la possibilité de créer des Services d'Activités Industrielles et Commerciales, des SAIC. "Cependant, il faut souligner que c'est aujourd'hui le seul décret concernant cette loi qui ne soit toujours pas publié", précise M. COSTES. " Il s’agit effectivement de celui qui pose encore quelques problèmes, en particulier en matière de fiscalité ".

Les actions en faveur de la création d'entreprises

"En matière de création d'entreprises innovantes, nous menons un certain nombre d'actions complémentaires : formation à l'entreprenariat dans les universités et au sein des écoles d'ingénieurs - concours de création d'entreprises innovantes - développement d'incubateurs - création de fonds d'amorçage nationaux et thématiques d'une part, régionaux et multisectoriels d'autre part", nous explique Alain COSTES.

Quelques précisions à propos du concours national de création d'entreprises innovantes.

Son but est de soutenir des projets jusqu'à la création effective de l'entreprise.

Ce concours s'adresse à deux catégories de projets :

* les projets en création, pour lesquels seuls trois à six mois sont nécessaires afin qu'ils aboutissent ;

* les projets en émergence, c'est-à-dire ceux qui nécessitent un véritable développement avant d'entamer la phase de création.

En 1999, année de sa première édition, le concours était doté de 100 millions de francs. Sur 1900 dossiers reçus, 244 avaient été sélectionnés. Pour l'année 2000, avec un budget doublé, 296 projets ont été retenus sur 1800 soumis… Un budget de 200 millions de francs qui a été reconduit en 2001…

"A l'analyse des dossiers de candidature - comme le précise Alain COSTES -, il apparaît qu'un nombre important de participants à ce concours sont des post-doc, partis à l'étranger, en particulier aux Etats-Unis, et revenus en France par l'intermédiaire de ce concours, dans le but de créer une entreprise sur le sol français", remarque M. COSTES.

Sur l'ensemble des projets en création pour les années 1999 et 2000, 85 % sont aujourd'hui des entreprises qui fonctionnent.

Lieux d'accueil et d'accompagnement de ces projets, les incubateurs sont le fruit d'un partenariat avec la recherche publique ; ils sont ouverts uniquement à de jeunes créateurs d'entreprise issus de la recherche académique, ou à des candidats qui démontrent qu'ils ont besoin de relations très étroites avec les laboratoires de recherche publique.

Aujourd'hui, il existe en France 31 incubateurs soutenus, soit globalement un par région (à l'exception de l'Ile-de-France qui en abrite 5 et de la région Rhône-Alpes qui en compte 2).

Notons que, sur les 10 premiers incubateurs créés, le nombre de projets de création d'entreprises suivis est supérieur de 27 % à l'objectif initialement fixé. "De plus, un nombre non négligeable d'incubés sont des lauréats du concours national de création d'entreprises. Preuve qu'il existe dans les faits un lien étroit entre le concours et l'incubation ", se félicite M. COSTES.

Le partenariat technologique

"Aujourd'hui, on ne parle plus de transfert technologique, mais véritablement de partenariat, dans lequel chacun amène ses compétences, qui sont complémentaires de celles de son partenaire", estime M. COSTES.

Premier de ces outils, les Réseaux de Recherche et d'Innovations Technologiques associent des équipes de recherche publique et des entreprises autour de thématiques d'intérêt primordial, afin de répondre à la demande du monde économique.

Actuellement, 14 réseaux de ce type sont opérationnels :

- 4 pour les STIC (Télécommunications, Micro et Nanotechnologies, Technologies logicielles, Audiovisuel et Multimédia).

- 3 pour les Sciences et Technologies du Vivant (Genhomme, Génoplante, Technologie pour la Santé) ;

- 2 pour les Transports et l'Urbanisme ;

- 2 pour l'Aéronautique et l'Espace ;

- 2 dans le domaine de l'Environnement (Eau et Technologies de l'environnement, Pollutions marines accidentelles)

- enfin le dernier, centré sur l'Energie, concerne plus particulièrement les différents aspects de la pile à combustible.

Deuxième outil : les Centres Nationaux de Recherche Technologique (CNRT) dont l'objectif vise également à favoriser le développement des activités de recherche technologique. Au nombre de 13, tous ces centres sont situés sur un site bien défini, dans un domaine applicatif très précis, et réunissent des partenaires publics et privés.

Complémentaires des Réseaux de Recherche et d'Innovations Technologiques, les CNRT peuvent être considérés comme les véritables têtes de pont de ces réseaux au niveau national. Ils possèdent également un rôle très important au plan européen, puisqu'ils dessinent des axes de compétences au niveau d'un certain nombre de villes et de régions, soutenus par la présence d'industriels dans le domaine correspondant.

"Le réseau national est important, mais le niveau régional l'est tout autant", poursuit M. COSTES. "Aussi, afin d'organiser la demande à l’échelle régionale, avons-nous mis en place des Réseaux de Diffusion Technologique."

Il s'agit d'un guichet unique de conseillers en développement technologique mis à la disposition des PME/PMI, pour les orienter vers le prestataire de service considéré comme étant le meilleur et le plus efficace. Soulignons que ce réseau est dirigé en commun par 4 grandes structures : l'ANVAR, les DRIRE, les Délégués Régionaux de la Recherche et de la Technologie et les Conseils Régionaux.

Quant à l'organisation de l'offre en matière de technologies innovantes, elle passe par la professionnalisation des structures prestataires de services et la synergie d'actions avec les établissements d'enseignement et de recherche.

A noter, également, que le Fonds de Recherche Technologique (FRT), à la base des opérations de Réseaux à la Direction de la Technologie, a largement évolué ces quatre dernières années : de 467 millions de francs en 1997 à 1 milliard de francs en 2001.

L'insertion des jeunes diplômés

"L'insertion des jeunes diplômés dans la vie économique est l'un de nos principaux soucis", stipule Alain COSTES. "Pour y parvenir, nous disposons d'un certain nombre d'outils correspondant à des niveaux de formation différents, à l'exemple des Conventions de Recherche CORTECHS pour les Techniciens Supérieurs." Sur 97% des CORTECHS analysés, les jeunes techniciens ont trouvé une place définitive dans l'entreprise correspondante. Ce résultat encourageant est d'autant plus important que les CORTECHS constituent très souvent une première expérience pour une PME/PMI.

"Or, quand un industriel a fait une première expérience dans ce cadre, il souhaite souvent aller plus loin, via la préparation d'un dossier à l'ANVAR ou parfois à travers la mise en place d'un département de développement technologique…"

Les coopérations

Au début de l'année 2001, la Direction de la Technologie s'est vu confier, au sein du Ministère de la Recherche, les dossiers concernant la question de l'espace européen de la recherche et de l'innovation, le PCRD (Programme Cadre de Recherche et de Développement technologique), les procédures EUREKA et COST.

"A propos du PCRD, je souhaite apporter quelques précisions qui me paraissent essentielles", ajoute M. COSTES. "Le problème européen n'est pas, a priori, un débat franco-français. Je crois qu'il faut être clair à ce sujet, éviter de perdre trop de temps dans les débats interministériels et aller travailler, discuter, négocier à Bruxelles. Pour ma part, j'estime que nous sommes trop souvent en retard par rapport aux positions bruxelloises ; nous devons donc nous améliorer rapidement…"

Pour recevoir un compte rendu plus détaillé de l'intervention du Professeur Alain COSTES dans Les Carnets de la MET, contactez Mme Françoise MULLER-GAUTHIER, Maison Européenne des Technologies, Université Pierre et Marie Curie sur met@admp6.jussieu.fr

Pour en savoir plus, n'hésitez pas à contacter :

M. Bruno DELL

Chargé de la Communication

Direction de la Technologie

Ministère de la Recherche