Octobre 2004 - n°92

L’Institut Pasteur nous présente son Service de Transfert de Technologie

Animée par une dizaine de personnes, sous la direction de M. Jean-Pierre SAINTOUIL, le Service de Transfert de Technologie (STT) constitue une pièce maîtresse de la stratégie de valorisation industrielle de l’Institut Pasteur. Une mission d’autant plus importante quand on sait que 40 % des ressources financières de l’Institut Pasteur sont le fruit du Business Développement..
Gros plan !

La place du STT au sein de l’Institut Pasteur

L’Institut Pasteur, fondation privée à but non lucratif, reconnue d’utilité publique, contribue à la prévention et au traitement de maladies, par la recherche, l’enseignement et ses actions de santé publique.
Fédérant au total pas moins de 8 500 personnes, l’Institut Pasteur est actif en France comme dans le monde entier. Sur son campus parisien, collaborent quelque 2700 pasteuriens, tandis que son Réseau International compte 23 établissements indépendants, unis par les mêmes missions, la même culture et les mêmes valeurs. Sous sonégide, sont également animés 22 Centres Nationaux de Référence et 8 Centres Collaborateurs de l’OMS.
Les ressources financières annuelles de l’Institut Pasteur (188 millions d’euros, en 2002) sont générées pour 29 % par les dons et legs, pour 31 % par les apports de l’Etat, et pour 40 % par les revenus de ses activités propres. «D’où, l’importance de la valorisation et du business development, développés de longue date au sein de notre Institut, en particulier dans le domaine des Vaccins et du Diagnostic», souligne M. SAINTOUIL.

Depuis quelques années, la professionnalisation et le renforcement des équipes Business Development ont marqué l’actualité pasteurienne. L’Institut Pasteur s’impose dès lors parmi le top 10 mondial du Licensing en matière de biotechnologie,à l’instar des grandes universités américaines. Une cinquantaine de personnes collaborent aujourd’hui au sein de la Direction de la Valorisation et des Partenariats Industriels (DVPI), sous la coordination de M. Christian POLICARD.
«Les membres de la DVPI et les chercheurs de l’Institut Pasteur travaillent ensemble pour identifier toute invention (ou savoir-faire) ayant un potentiel commercial, puis la protéger et la valoriser. L’interface avec les équipes de recherche est assurée par un comité scientifique – formé à la valorisation – jouant le rôle de relais au niveau de chacun des départements de recherche», nous explique M. SAINTOUIL.
L’efficacité des membres de la DVPI vient assurément de la complémentarité de leurs compétences,à la fois dans les domaines du juridique, du scientifique, du marketing, de la propriété intellectuelle, de la négociation, de la gestion financière… Des compétences organisées et valorisées au sein de cinq équipes : l’équipe Coordination Scientifique, le Service des Brevets et des Inventions, le Service des Accords Industriels, l’incubateur Pasteur BioTop et le Service de Transfert de Technologie. C’est à ce dernier, tout particulièrement, que nous nous intéresserons dans la suite de ce reportage…

Les missions du Service de Transfert de Technologie

Le Service de Transfert de Technologie a pour mission de valoriser auprès des industriels, d’une part les inventions faîtes par les chercheurs de l’Institut Pasteur, d’autre part les produits et services que certains laboratoires de recherche pasteuriens rendent disponibles sur demande. C’est aujourd’hui sous la direction de M. Jean-Pierre SAINTOUIL, fort de 15 années d’expérience au sein de la société Sanofi Diagnostic Pasteur, qu’intervient l’équipe Transfert de Technologie de l’Institut Pasteur. Cinq chargés d’affaires et quatre assistantes marketing y travaillent ensemble…
«Lorsqu’une invention est réalisée dans un laboratoire de l’Institut Pasteur, le chercheur concerné est invité à remplir un dossier pour constituer une Déclaration d'Invention», nous explique M. SAINTOUIL.

Tous les mois, M. SAINTOUIL, M. POLICARD, le Service Brevets et les responsables de l’équipe de la Coordination Scientifique se réunissent afin de prendre connaissance des nouvelles Déclarations d’Inventions et décider de celles dont ils accompagneront la valorisation. Trois critères sont impérativement pris en compte à ce stade : qualité scientifique, caractère innovant et marché…

Le Service de Transfert de Technologie peut procéder à une étude de marché préliminaire des potentialités industrielles de chaque invention et rencontrer les inventeurs pour discuter des applications possibles de leur technologie. Par l’évaluation de l’intérêt industriel des inventions concernées, le STT contribue ainsi à la politique de prise de brevets… «Une fois l’invention brevetée, elle devient un " produit " à valoriser», poursuit Jean-Pierre SAINTOUIL.

Deux champs d’investigation sont alors développés :

une action Marketing et Communication, débutant par le résumé des caractéristiques de l’invention et de ses applications possibles (cf la liste des technologies sur www.pasteur.fr), puis l’identification des industriels potentiellement intéressés par cette technologie. Le STT prend ensuite contact avec ces sociétés via un mailing ciblé et à l’occasion des grands meetings internationaux.

la négociation des licences et brevets :
Lorsqu’un industriel émet le souhait d’exploiter une découverte pasteurienne, le STT négocie, avec l’aide du Service des Brevets et de la Direction Juridique, les termes des accords de R&D et des contrats de licence. Il assure également le suivi de chacun de ces contrats avec les partenaires industriels.

Notez que le portefeuille de l’Institut Pasteur ne compte pas moins de 3500 brevets (dont près de 430 brevets prioritaires), plus de 200 contrats de licence avec l’Industrie. De plus, une trentaine de contrats R&D sont signés chaque année. Parmi les principaux domaines d’applications concernés : les animaux modèles, la cancérologie, le diagnostic, l’immunothérapie, l’inflammation, le matériel biologique (souches), la neurobiologie, la thérapeutique (bactérienne et fongique, virale, HIV, Shigella…) la thérapie génique, le vaccin humain et le vaccin vétérinaire…

Stratégies d’avenir…

En matière de transfert de technologie, il est intéressant de noter de quelles façons l’Institut Pasteur s’est adapté à l’évolution du marché.

Stratégie n° 1 : Pasteur BioTop, pour répondre au phénomène Biotech.
Fondé en décembre 2000, l’incubateur d’entreprises de biotechnologies Pasteur BioTop répond à deux objectifs : offrir aux scientifiques pasteuriens la possibilité de créer leur propre société et accueillir des start-up, même externes, exploitant au moins une licence de brevet déposé par l’Institut Pasteur.

Chaque start-up hébergée au sein du Pasteur BioTop bénéficie d’un module qui lui est propre et d’un libre accès aux zones communes dotées notamment d’une chambre froide, d’une laverie, d’une pièce photo et d’un laboratoire P2 équipé de poste de sécurité microbiologique, d’incubateurà CO2 et de centrifugeuse. D’une surface totale de 2500 m2, Pasteur BioTop accueille aujourd’hui 6 sociétés ; il pourra héberger à terme jusqu’à 12 entreprises pour une durée maximum de 24 mois…

Stratégie n° 2 : restructurer le pré-développement thérapeutique
«Dans le contexte actuel encore peu favorable aux investissements, l’Industrie est à la recherche des projets les moins risqués possibles, c’est-à-dire ceux dont la preuve du concept est réalisée», constate M. SAINTOUIL.
Les Big Pharma n’intervenant bien souvent, aujourd’hui, qu’à partir de la phase II des essais cliniques, il est nécessaire d’impliquer de nouveaux acteurs dans le processus de drug discovery.
«Dans cette optique, l’Institut Pasteur a tout récemment développé une nouvelle stratégie», nous confie Jean-Pierre SAINTOUIL. «Il s’agit tout d’abord de «remuscler» et restructurer notre Département de Chimie Thérapeutique afin de valider les cibles identifiées dans nos laboratoires, puis de sélectionner les composés, candidats médicaments (" hits ") en effectuant un premier criblage moléculaire…»

L’étape suivante consiste à réaliser, dans le cadre de nouveaux partenariats, un criblage secondaire qui permet d’aboutir, après l’optimisation des molécules "hits" et de nouvelles validations, aux composés offrant le meilleur potentiel d’action pharmacologique : les " têtes de série" ou " leads ".
«Ces molécules seront ensuite licenciées aux sociétés biotech pour débuter les essais cliniques, puis présentées aux industries pharmaceutiques pour poursuivre les études cliniques jusqu’à l’AMM», ajoute M. SAINTOUIL.

Stratégie n° 3 : l’international !
La troisième orientation stratégique du STT pour l’avenir est géographique. A Boston Massachusetts), l’Institut Pasteur a rejoint dès mai 2003 un bureau de représentation créé par le Consortium BioTeam Paris Region, afin de promouvoir aux Etats-Unis le secteur des sciences de la vie de la région parisienne.
L’Institut Pasteur augmente ainsi sa visibilité aux Etats-Unis en vue de faciliter la signature d’accords de collaboration de R&D et de transfert de technologie avec les sociétés présentes dans le Massachusetts. Il espère également par cette présence favoriser les collaborations pour l’autorisation d’exploitation de brevets, licences…

Précisons que le Consortium BioTeam Paris Region appartient au réseau BioTeam Paris Région qui rassemble des universités, centres de recherches, entreprises -à l’exemple des sociétés UroGene, BioProtein Technologies, Hybrigenics et Biocortech-, ainsi que l’agence de développement économique en Essonne et Paris Développement.
«Les premiers accords sont en passe de se signer aux Etats-Unis, tandis qu’un projet du même type est aujourd’hui à l’étude au Japon», nous confie Jean-Pierre SAINTOUIL.

Prochains objectifs pour le STT ? Développer de façon importante la valorisation du secteur Thérapeutique afin de compenser les diminutions de ressources, liées à la tombée dans le domaine public de certains brevets Diagnostic et Vaccin… jusqu’à multiplier par deux les revenus du Transfert de Technologie de l’Institut Pasteur dans les dix prochaines années !

S. DENIS