Mars 2006 - n°108

La Virologie prend de l’ampleur à Strasbourg…

Le 28 octobre 2005, deux nouvelles unités mixtes de recherche Université Louis Pasteur-Inserm ont été inaugurées à l’institut de Virologie de la Faculté de médecine de Strasbourg. Elles forment désormais un pôle de recherche international en virologie spécialisé dans l’étude des deux maladies qui affectent des milliers de personnes : l’hépatite C et le sida.

Développer un domaine de recherche d’excellence en virologie humaine au sein de la Faculté de médecine de Strasbourg…
Voilà le nouveau défi que relèvent conjointement l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm) et l’Université Louis Pasteur –ULP.
Suite à un appel d’offre international, les professeurs Thomas Baumert et Jeremy Luban viennent d’être nommés à la direction d’une unité de recherche mixte Inserm/ULP pour développer des projets de recherche clinique et fondamentale qui, pour certains, seront menés avec les Hôpitaux Universitaires de Strasbourg (HUS).

Naissance de deux unités

L’unité existante intitulée « Pathogénie des infections virales persistantes » est désormais restructurée en deux unités mixtes Inserm-ULP :

L’Unité « Infection par le virus de l’hépatite C : interaction virus-hôte et pathogenèse » qui sera dirigée par le Professeur Thomas Baumert. Ce dernier a acquis une excellente expérience dans le domaine des hépatites virales et de la biologie du VHC. Il propose d’ailleurs d’analyser à l’échelle moléculaire les interactions entre le virus et sa cellule cible. Ce projet tiendra compte des travaux précédents de M. Baumert, grâce auxquels il a pu déterminer des structures cellulaires et virales impliquées dans l’interaction entre le virus et la membrane cellulaire, et identifier des cibles de la réponse immunitaire antivirale en utilisant de nouveaux modèles expérimentaux.
Des approches méthodologiques innovantes en virologie, biologie moléculaire, immunologie, génomique fonctionnelle et hépatologie clinique seront utilisées par le Docteur Baumert et son équipe.
Le programme comporte 2 volets. Le premier consiste à analyser d’une part, les premières étapes de l’infection virale (entrée du virus dans la cellule hôte et mécanismes moléculaires de la neutralisation du virus) et d’autre part, la caractérisation des interactions entre protéines virales et cellulaires durant le cycle de réplication. Le second volet implique l’étude des conséquences de l’infection par le virus sur le fonctionnement des cellules dendritiques (cellules présentatrices de l’antigène).
Thomas Baumert maintiendra des collaborations scientifiques avec les Départements de Médecine et de virologie de Fribourg (Allemagne).

L’Unité de recherche « Réplication virale, pathogenèse et immunité »

Dédiée au VIH et dirigée par le docteur en médecine Jeremy Luban, cette unité va approfondir les mécanismes de la réplication du VIH-1 et de la pathogenèse du virus afin d’appréhender les éléments et les contrôles régulant non seulement la vie du virus, mais aussi celle de la cellule. Pour ce faire, deux axes de recherche seront développés : d’une part , l’étude des facteurs cellulaires positifs et négatifs régulant la réplication du VIH-1, et d’autre part, le développement de modèles expérimentaux nécessaires au programme. A long terme, l’élucidation des mécanismes de la réplication du virus et d’échappement au système immunitaire chez l’homme, permettra de contribuer au développement de nouveaux médicaments et vaccins visant à contrôler le virus.
Jeremy Luban est connu mondialement grâce à son travail de pionnier et aux résultats originaux obtenus sur les facteurs de restriction cellulaires contrôlant la réplication du VIH-1. Il apportera son expérience sur ce sujet pour les recherches de cette nouvelle unité. Le nouveau directeur de l’unité prévoit une coopération avec l’institut de recherche de Biomédecine de Bellizona (Suisse), renommé dans le domaine de l’immunologie.
Au niveau des infrastructures, l’Institut de virologie de l’ULP est parfaitement adapté pour mener ces recherches. Les locaux comportent des laboratoires de confinement L3 et A3 indispensables pour manipuler ces virus pathogènes pour l’homme. Concernant l’appareillage, il est devenu indispensable d’acquérir une instrumentation scientifique de nouvelle génération.

La recherche VIH/VHC est devenue une nécessité

Il faut savoir que l’ancienne unité« Pathogénie des infections virales persistantes » s’est consacrée pendant de nombreuses années à l’étude des relations hôte/virus et à la compréhension des mécanismes impliqués dans la genèse de pathologies virales, étude menée avec le virus de l’immunodéficience humaine (VIH) et le virus de l’hépatite C (VHC).

Ces derniers représentent un problème majeur de santé publique. Les pathologies liées aux deux virus sont cause d’handicap important ou de mortalité élevée. Cependant, il n’existe aucun vaccin à l’heure actuelle pour prévenir l’infection par ces deux virus. Selon l’organisation mondiale de la santé (OMS), on estime que 170 millions de personnes dans le monde sont porteurs chroniques du VHC et que 3 à 4 millions de personnes sont infectées chaque année. Pour le sida, le nombre de personnes vivant avec le VIH est passé de 37,8 millions en 2003 à 39,4 millions en 2005.
Le groupe de recherche en virologie a établi de longue date des collaborations nationales et internationales pour la mise au point de vaccins anti-VIH et VHC, dans le cadre de réseaux européens et en collaboration avec Pasteur-Mérieux, Aventis ou BioMérieux. L’ancienne unité a également développé une plate-forme pour l’étude des anticorps neutralisant le VIH, avec le concours de l’Agence nationale de recherches sur le sida et les hépatites virales et l’évaluation de protocoles pour le suivi des essais vaccinaux. Toutes ces avancées vont contribuer au développement des recherches des deux nouvelles unités.

C’est donc tout un domaine d’excellence en virologie et maladies infectieuses qui est en train de se constituer à Strasbourg. Il est d’ailleurs essentiel de maintenir une recherche de haut niveau, compte tenu du nombre d’infections virales émergentes affectant la population humaine et des problèmes de santé publique qui en résultent. Ce nouveau pôle de recherche vient renforcer le pôle « Vie et Santé » déjà bien établi au sein de la Faculté de Médecine de l’ULP et des HUS. Un pari primordial sur l’avenir humain…

M. HASLÉ