Avril 2006 - n°109

Le Département de Transfert de l’Institut Curie
Une passerelle indispensable entre la recherche et la clinique

Faire progresser la prévention, le diagnostic et le traitement des cancers : telle est la motivation des chercheurs et médecins de l’Institut Curie. Le Département Transfert joue dans ce cadre un rôle essentiel. Conjuguant le savoir-faire de plus de 60équipes de recherche avec les questions biomédicales des cancérologues, il représente un atout majeur pour assurer le passage rapide des progrès de la recherche vers le patient, le passage du concept à la pratique médicale.
Associées à la valorisation, ses activités bénéficient au sein de l’Institut Curie de structures opérationnelles innovantes qui s’appuient sur des ressources uniques et une longue expérience des collaborations multidisciplinaires…

Des fondements historiques

L’introduction à l’Hôpital de pratiques médicales nouvelles, directement issues de la recherche fondamentale, constitue une mission essentielle pour l’ensemble des acteurs de l’Institut Curie. Cette activité de Transfert trouve d’ailleurs ses fondements dans l’histoire même de l’Institut, puisque Marie CURIE et Claudius REGAUD ont été les premiers à introduire les rayonnements ionisants en thérapeutique.
Initiée de longue date à l’Institut Curie, cette démarche a été considérablement renforcée par la création, en novembre 2003, d’une structure transversale importante : le Département Transfert. Le Département, dirigé par M. Jean Paul Thiery répond aux enjeux actuels visant l’identification de nouvelles cibles anticancéreuses et la définition de modalités thérapeutiques qui prennent en compte les facteurs prédictifs de la réponse au traitement.
Au cœur de ses missions : le développement, l’évaluation et la validation des techniques diagnostiques, les dispositifs biomédicaux ou les approches thérapeutiques dont la conception s’appuie sur la recherche fondamentale…

Une banque d’échantillons biologiques exceptionnelle et une chimiothèque de pointe

L’hôpital de l’Institut Curie dispose d’un Centre de ressources biologiques, parmi les plus importants en Europe. Comptant plus de 50 000 échantillons de tumeurs et de prélèvements sanguins, cette banque offre une collection unique d’ADN, d’ARN et de protéines d’une valeur inestimable pour les chercheurs, les cliniciens et les industriels. Enrichie jour après jour, elle est gérée par des procédures informatisées et robotisées pour assurer une parfaite traçabilité. Son exploitation a en outre été facilitée par la mise en œuvre de « biopuces tissulaires » ; des lames de verre portant plus de 100 coupes histologiques, chacune constituée de 1000 à 2000 cellules tumorales, qui permettent une validation très rapide de marqueurs.
Notez que l’Institut Curie compte également une chimiothèque réunissant plus de 10 000 substances chimiques. Une banque de données a été constituée. Elle permet de tester en haut débit des candidats médicaments capables de réagir avec les protéines identifiées pour leur implication dans le développement tumoral…

Des plates-formes technologiques ultramodernes

Le Département Transfert réunit et coordonne également cinq plates-formes mises à disposition de toutes les unités de recherche de l’Institut Curie. Robotisées et ultra-modernes, ces plates-formes ont été conçues en tenant compte de la période de vie relativement courte des technologies de pointe utilisées aujourd’hui. Elles bénéficient d’une veille technologique constante et de la mise à disposition de nouveaux prototypes.

1. Génomique et protéomique
Cette plateforme analyse de façon semi-automatisée et à haut débit les altérations du génome, des ARNs transcrits (transcriptome) et des protéines (protéome) dans les cellules tumorales. Elle permet une étude qualitative et quantitative du génotype et du phénotype de ces cellules. L’objectif de ces analyses est de caractériser un certain nombre de gènes impliqués dans les différents cancers.
Associée à la bioinformatique, cette plateforme devrait permettre d’effectuer une classification moléculaire des cancers, à visée diagnostique, pronostique et prédictive.

2. Bioanalyse
Cette plateforme permet de décrypter l’ensemble des données accumulées par l’analyse des altérations du génome et du protéome. Elle fait appel à des logiciels en développement et bénéficie du savoir-faire des biostatisticiens et des bioinformaticiens de l’Institut Curie. Elle gère au quotidien des milliards d’informations relatives à l’expression des gènes dans les tumeurs.

3. Validation fonctionnelle
Les équipements de dernière génération de cette plateforme permettent la microdissection par laser des tissus et l’analyse des marqueurs moléculaires sur puces tissulaires. Elle dispose également de toutes les techniques classiques ou innovantes de la biologie cellulaire et de l’imagerie de haute définition. Cela permet de positionner les cibles potentielles au niveau de noeuds stratégiques dans les circuits de signalisation en jeu dans les processus tumoraux. La plateforme interagit également avec leséquipes impliquées dans le développement des méthodes de visualisation et d’analyse d’images ainsi qu’avec celles spécialistes de la transduction du signal et de la carte des interactions protéiques.

4. Analyse de la réponse immune et tri cellulaire
Un des objectifs essentiels de la plateforme d’immunomonitoring et de tri cellulaire est le développement de nouveaux outils et de méthodes innovantes d’analyse de la réponse immune lors du développement et la dissémination de cellules cancéreuses. Grâce aux outils disponibles sur cette plateforme, les chercheurs peuvent aussi adapter des stratégies vaccinales en identifiant de nouveaux antigènes et des adjuvants présentant des capacités de meilleure activation du système immunitaire.
Cette plateforme peut également identifier des anticorps à usage thérapeutique, les évaluer et les adapter à une utilisation en recherche clinique.

5. Expérimentation in vivo
Les travaux réalisés grâce à cette plateforme sont en amont de toute recherche clinique. Elle utilise les services d’une animalerie composée de souris. Elle permet la production d’animaux génétiquement modifiés, la cryoconservation et le transfert d’embryons. Entièrement rénovée en 2004, l’animalerie accueille également des souris immuno-déficientes sur lesquelles peuvent être greffées des tumeurs humaines. Grâce à ces modèles murins, il est possible de suivre en temps réel l’évolution des tumeurs et leur réponse à des traitements en cours de validation.

Des programmes transversaux innovants…

Pour mener à bien ses missions, le Département de Transfert développe notamment des programmes de recherche thérapeutique en partenariat avec l’industrie, et pilote des Programmes Incitatifs et Coopératifs (PICs).

Réservoir exceptionnel de savoir-faire et de nouvelles connaissances, les PICs sont pour la plupart coordonnés conjointement par un chercheur et un médecin, et favorisent étroitement les interactions entre domaines situés aux interfaces (physique/biologie, physique/chimie, recherche fondamentale/recherche biomédicale).

Quatre programmes prioritaires ont été définis par l’Institut Curie dans l’objectif de valoriser et de transférer les résultats vers l’hôpital :
- Vectorisation anti-tumorale à fin diagnostique et thérapeutique
- Physique du vivant : de la molécule isoléeà la cellule
- rétinoblastome
- bioinformatique

… et des programmes à venir dans les cancers du sein, la génétique…

SD

Les chiffres clés du Département Tranfert de l’Institut Curie
• 50 000 échantillons biologiques, dont 2 000 nouveaux chaque année
• 4 programmes innovants prioritaires en 2006 (PIC, Programmes Incitatifs et Coopératifs) financés chaque année, chacun à hauteur de 150 000 euros/an en moyenne
• 5 plates-formes de haute technologie
• 30 chercheurs et médecins assistés de 15 ingénieurs et techniciens
• 1 000 m2 de laboratoires