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Les maladies rares au Maroc, des difficultés au quotidien


Les maladies rares, anciennement appelées maladies orphelines, posent partout dans le monde un grand défi en raison de la difficulté de leur diagnostic et de l’exigence de leur prise en charge. Au Maroc, elles posent un véritable problème de santé publique par manque de dépistage, insuffisance de centres de soins spécialisés et non disponibilité de nombreux médicaments.

Des maladies rares, mais de nombreux malades

Les maladies rares sont un ensemble de maladies qui par définition touchent moins d’une personne sur 2 000, mais elles se comptent par milliers. Près de 8 000 maladies rares sont déjà recensées et chaque année, 200 à 300 maladies rares sont nouvellement décrites. Ainsi, on estime que plus de 5% de la population mondiale serait concernée, dont environ 1.5 millions de marocains.

Les maladies rares : un panorama très large

Les maladies rares sont extrêmement diverses, elles sont d’origine génétique, infectieuse, cancéreuse… ou autoimmune. 3 maladies rares sur 4 se déclenchent dans l’enfance, mais certaines attendent 30, 40 ou 50 ans avant de se déclarer.
Très diverses, les maladies rares altèrent la vision en cas de rétinite pigmentaire, compromettent la respiration dans la mucoviscidose. Elles empêchent de résister aux infections dans les déficits immunitaires ou que le sang coagule normalement en cas d’hémophilie. D’autres maladies rares provoquent un vieillissement accéléré (progéria, 100 cas dans le monde), des fractures à répétition (maladie des os de verre) ou une transformation des muscles en os (maladie de l’homme de pierre, 2 500 cas dans le monde).
Certaines maladies rares sont d’origine auto-immune. Dans ces maladies autoimmunes, le système immunitaire attaque les propres constituants de l’organisme, au lieu de les protéger.
Elles sont une centaine, parmi lesquelles on peut citer le lupus, engendrant une sensibilité au soleil et une atteinte rénale, la maladie de Gougerot-Sjögren, qui assèche la bouche et les yeux ou la sclérodermie, se manifestant notamment par un durcissement de la peau. On citera aussi les vascularites qui s’attaquent aux parois des vaisseaux sanguins, les cryoglobulinémies dues à des protéines anormales qui précipitent dans le sang au froid et endommagent tous les organes…

Les maladies rares au Maroc, des difficultés au quotidien


Un manque d’information et des moyens à disposition limités

Au Maroc, on ne peut nier que d’importants efforts ont été accomplis ces dernières années dans les services de pédiatrie, neurologie, médecine interne et de génétique, pour mieux prendre en charge ces maladies. Néanmoins il reste difficile d’obtenir des informations précises, aussi bien sur les maladies elles- mêmes que sur les professionnels de santé qui peuvent potentiellement les prendre en charge.

Il en résulte un grand isolement pour les malades et leurs familles, qui sont entrainés dans un parcours du combattant éprouvant. Il faut couramment de deux à dix ans pour qu’un diagnostic soit établi et, le cas échéant, que les traitements appropriés puissent être administrés. Le diagnostic des maladies rares est souvent difficile, car elles atteignent fréquemment plusieurs organes, ce qui multiplie le nombre de symptômes et rend leur présentation clinique déroutante. Ce diagnostic nécessite en plus des moyens d’investigation difficiles à obtenir car parfois très coûteux ou peu connus.
Un grand nombre de patients, jamais diagnostiqués, sont ainsi soignés seulement sur la base de l’expression de leurs symptômes, d’autres voient leur état se dégrader et certains décèdent, en l’absence de diagnostic précis et de soins appropriés.

Aussi, pour limiter les dégâts causés par les maladies rares, un dépistage de certaines d’entre elles doit se réaliser systématiquement chez tous les nouveau- nés. Malheureusement, le Maroc n’a pas encore mis en place un dépistage néonatal systématique pour tous les nouveau- nés. Il y a quelques projets pilotes dans certaines maternités avec un nombre très limité de maladies dépistées. Pourtant, ce dépistage est d’une importance capitale, il permettrait en effet d‘éviter certains handicaps, grâce à des traitements peu coûteux, comme par exemple dans le cas de l’hypothyroïdie congénitale ou grâce à un régime alimentaire comme dans le cas de la phénylcétonurie, une maladie rare héréditaire qui engendre un handicap mental à cause d’un défaut d’assimilation d’un acide aminé, la phénylalanine.

Les médicaments « orphelins » : une meilleure disponibilité au Maroc

Les thérapeutiques employées spécifiquement pour les maladies rares sont appelées médicaments orphelins. Ils ont connu ces dernières années un essor considérable et les laboratoires pharmaceutiques s’y intéressent de plus en plus, car les résultats des recherches sur une maladie rare bénéficient aussi au traitement des maladies plus communes.

Cet essor n’aurait pas pu voir le jour sans une loi promulguée en 1983 aux Etats-Unis, la « Orphan Drug Act ». Cette loi a donné un statut au médicament orphelin, offrant un accès plus rapide au marché, dispensant de certaines taxes et impôts et garantissant une exclusivité commerciale de dix ans en Europe et sept ans aux États-Unis. Par ailleurs, les essais cliniques nécessaires pour l’évaluation de ces traitements ont été simplifiés : de plus petites cohortes, comprenant une dizaine ou une centaine de malades, suffisent à prouver l’efficacité du produit, alors qu’habituellement elles doivent comporter des milliers de volontaires avant la commercialisation d’un médicament classique. Les délais d’une autorisation de mise sur le marché (AMM) sont aussi raccourcis. Toutes ces mesures ont diminué les coûts et encouragé la recherche.

Au Maroc, on ne dispose pas de ce statut de médicament orphelin et les  laboratoires pharmaceutiques qui veulent introduire un médicament nécessaire au traitement d’une maladie rare n’ont pas d’autre choix que de suivre le parcours standard. Néanmoins, plusieurs médicaments orphelins ont été introduits récemment au Maroc notamment pour les maladies lysosomales (maladie de Gaucher, maladie de Fabry, maladie de Hurler et maladie de Pompe).

Maladies rares et Covid 19 : La double peine

L’impact de cette crise sanitaire sur le vécu déjà précaire des personnes touchées par une maladie rare a été considérable. La solidarité familiale et sociale, très utile notamment pour obtenir des médicaments non disponibles au Maroc, s’est vue entravée par le confinement et la fermeture des frontières mis en vigueur au début de l’épidémie. Heureusement, certaines associations de patients se sont beaucoup activées dans cette période, notamment l’association marocaine contre la mucoviscidose, qui s’est chargée de l’approvisionnement des patients en médicaments non disponibles au Maroc. Les personnes atteintes de phénylcétonurie ont également bénéficié de soutien d’associations de malades et de l’aide de la diaspora marocaine établie aux Etats-Unis.

L’Alliance des Maladies rares du Maroc (AMRM)

L’AMRM a été fondée en 2017, à l’initiative de l’association marocaine des maladies auto-immunes et systémiques (AMMAIS), avec le regroupement de plusieurs associations de patients oeuvrant dans le domaine des maladies rares. L’AMRM a pour objectifs de faire connaître et reconnaître les maladies rares auprès du public, des pouvoirs publics et des professionnels de santé par tous les moyens (presse écrite, télévision, radio, sites internet et réseaux sociaux), et de contribuer à l’information des médecins en organisant des colloques thématiques sur les maladies rares. L’Alliance se donne par ailleurs pour principal but de contribuer à la création, par les malades eux-mêmes, d’associations spécifiques, comme elle l’a déjà fait pour l’Association marocaine des malades d’angioedèmes (AMMAO) et pour l’Association pour les personnes atteintes de rachitisme vitamino résistant hypophosphatémique (RVRH-XLH).

Par ailleurs, l’Alliance au Maroc collabore étroitement avec beaucoup d’autres associations oeuvrant sur une pathologie particulière, comme l’Association de solidarité avec les enfants de la lune Maroc, l’Association Marocaine contre la Mucoviscidose, l’Association des amis des myasthéniques (AAMM), l’Association marocaine du syndrome de Rett (AMSR).

L’Alliance entretient aussi des relations d’amitié, de solidarité et de collaboration avec de nombreuses associations et organisations de malades à travers le monde, notamment l’association française de Gougerot-Sjögren (AFGS) et le réseau international du Gougerot-Sjögren, l’Alliance des maladies rares française ou l’organisation world’s Hereditary Angioedema (HAEi)…

Pour mieux sensibiliser aux maladies rares, l’Alliance a déjà organisé plusieurs manifestations, journées nationales de maladies rares, conférences de presse, journées thématiques pour les patients. Elle publie également des articles dans les journaux et participe à des émissions de radio. En décembre dernier, un webinaire a été organisé pour souligner encore une fois l’ampleur de ces maladies. La rencontre a été émaillée par des témoignages de patients et de leurs familles, afin de sensibiliser sur les difficultés rencontrées au quotidien, d’autant plus en ce temps de pandémie.

Pour toutes ces raisons, les maladies rares ont besoin d’être reconnues au Maroc comme une priorité de santé publique et de faire l’objet, comme dans les pays développés, d’un plan national de maladies rares. Il est crucial de développer des centres de référence nationaux pour permettre la réalisation des diagnostics et le développement des expertises, et de mettre en place des centres de compétence locaux, pour assurer aux patients des soins de proximité. Ces structures sont difficiles à mettre en place, elles nécessitent des moyens financiers et des ressources humaines, néanmoins leur bénéfice est significatif à long terme : une prise en charge thérapeutique adaptée sera toujours moins dispendieuse que des traitements inadaptés à vie ou que le nomadisme médical de patients désorientés !

Pour en savoir plus :
Contact :

Dr Moussayer Khadija
Présidente de l’Alliance Maladies Rares Maroc
Présidente de l’association marocaine des maladies auto-immunes et systémiques (AMMAIS)
Cabinet : 421 boulevard Abdelmoumen - Résidence Riad Abdelmoumen
Bâtiment B - bureau N° 10 - 2ème étage
Tél fixe : +212 (0)5 22 86 23 63
GSM : +212 (0)6 63 21 89 49
Alliance Maladies Rares Maroc - AMRM - Facebook  : https://fr-fr.facebook.com/Alliance-Maladies-Rares-Maroc-AMRM-304045633347368/

 

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