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2021-11-19 
Inventer l’équivalent du pacemaker, mais pour le cerveau

Mines Paris-PSL présente Paul Le Floch, CEO et co-fondateur d’Axoft

 
Grande école d’ingénieurs française, Mines Paris-PSL se donne pour ambition d’accompagner l’innovation et l’entrepreneuriat et prépare les ingénieurs, scientifiques et entrepreneurs du futur à répondre aux défis du 21ème siècle.
 
Pour refléter cette dynamique, l’Ecole vous propose de découvrir le portrait d’un entrepreneur de talent.
 
Rencontre avec Paul Le Floch, diplômé Mines Paris en 2012, doctorant à Harvard, CEO et co-fondateur d’Axoft, start-up issue de la recherche qui travaille sur un implant électronique aussi « mou » que le cerveau, pour améliorer la communication cerveau-machine et traiter les maladies neurodégénératives comme la maladie de Parkinson.


Premier double diplômé Mines Paris-PSL (spécialité matériaux) / ESPCI Paris-PSL, Paul s’est toujours passionné pour les polymères. Il a découvert la recherche fondamentale et appliquée au cours d’un stage de fin d’études, en 2016, à Harvard (USA). Après avoir lu plusieurs articles de recherche, sa rencontre avec Zhigang Suo, spécialiste de la mécanique des matériaux mous, Paul s’est lancé dans une thèse aux Etats-Unis intitulée : « Soft Materials and Devices for Brain-Electronics Interface ». (Matériaux et dispositifs mous pour l'interface cerveau-électronique).
 
Les deux premières années de sa thèse ont donc été consacrées à la découverte de matériaux mous imperméables et leurs applications. A partir de sa 3ème année de thèse, Paul a travaillé sous la direction du Professeur Jia Liu en bio-ingénierie et s’est familiarisé avec les technologies d’implants neuronaux ; prenant conscience de l’importance des propriétés mécaniques de ces derniers, idéalement identiques à celles du cerveau.
 
 
D’un sujet de recherche à la création d’une entreprise
 
Les implants neuronaux actuels sont particulièrement rigides. « C’est un peu comme si l’on posait, dans le système nerveux - dont la consistance est plutôt gélatineuse - un implant dont la dureté serait celle d’un clou ». L’implant peut avoir tendance à se déplacer dans le cerveau, ce qui provoque des réactions immunitaires et nécessite une nouvelle intervention. Ces implants sont faits de polymères rigides qui ont de bonnes qualités d’isolation, ce qui réduit la diffusion des molécules, des ions, et les rendent électriquement stables sur le long terme. En revanche, l’utilisation de ces matériaux rigides est limitée à des implants très minces (de l’ordre de quelques microns), afin de les rendre flexibles et donc plus biocompatibles vis à vis du cerveau. A cause de cette limitation en épaisseur, les implants ne peuvent pas contenir de très grands nombres de capteurs, ce qui limite de fait la bande passante entre le cerveau et la machine. Aujourd’hui, il est encore difficile de fabriquer des polymères qui soient à la fois mous et non diffusifs, c’est-à-dire imperméables.
 
Face à ce contexte, en collaboration avec un de ses directeurs de thèse et un post-doc rencontré à Harvard, le projet d’Axoft est né en 2021 (bien que l’idée fût formulée depuis 2018) pour construire et proposer une électronique implantable aussi « molle » que le cerveau pour améliorer et amplifier la communication cerveau-machine. Axoft a créé une toute nouvelle classe d'implants cérébraux qui sont 10 000 fois plus souples que les plastiques et 1 000 000 fois plus souples que le silicium utilisé dans les implants cérébraux actuels.
 
Ces recherches ont contribué à rendre les implants cérébraux d'Axoft non seulement souples, mais également évolutifs, capables d'intégrer de nombreux capteurs dans un seul implant avec les mêmes propriétés mécaniques que le cerveau. Paul imagine un avenir dans lequel au moins un million de capteurs pourraient être intégrés dans une interface cerveau-machine, aidant les aveugles avec une vue artificielle haute résolution.
 
La société souhaite créer une technologie assez efficace pour être communément acceptée par les chirurgiens et les patients, l’équivalent du pacemaker, mais pour le cerveau : des prothèses neurales (ou neuroprothèses) qui peuvent également s’appliquer - discrètement - à la colonne vertébrale, soit pour transmettre des influx nerveux, soit pour traiter la douleur chronique ou autre maladies neurodégénératives.
 
Candidat à une compétition interne à Harvard pour le financement d’une start-up, les investisseurs du jury ont été séduits par leur engagement et ont décidé de concrétiser leur projet. L’entreprise a ainsi été fondée en juin 2021 et compte concurrencer directement Neuralink, l’entreprise d’Elon Musk.
 
Axoft est désormais la seule entreprise de neurotechnologies soutenue par The Engine, l’incubateur du MIT, et prépare son second tour de table.
 
 
Oser et devenir acteur de son parcours : des conseils essentiels pour aider les jeunes ingénieurs français à se lancer dans l’entrepreneuriat
 
« Il faut oser et oser demander ! En France, on hésite parfois à sortir du cadre. Aux Etats-Unis, voir et rêver grand est perçu comme une qualité. J’ai osé lancer un double diplôme qui n’existait pas, j’ai osé prendre le meilleur de mes formations, j’ai osé faire une thèse à Harvard, j’ai osé ne pas me donner de limites, j’ai osé composer afin de devenir acteur de mon parcours ».
 
Il a pu cheminer durant ces 5 ans, et sait qu’une thèse en France se serait déroulée très différemment. Aux Etats-Unis, les universités donnent aux étudiants un grand pouvoir de décision et beaucoup de flexibilité sur leurs sujets de recherche. Et le fait d’avoir deux, trois, voire parfois quatre ans de plus pour terminer la thèse est déterminant, notamment pour mener à bien des projets expérimentaux.
 
« Au bout du compte, aller lentement pendant ses études, prendre le temps de réfléchir à ce que l’on a vraiment envie de faire professionnellement, c’est gagner du temps et aller plus vite sur le long terme pour accomplir de grandes choses. »
 
 
À propos de Mines Paris
Mines Paris, composante de l’Université PSL, forme les ingénieurs capables de relever les défis de demain, des leaders excellents scientifiquement, et internationaux. S’inscrivant dans son plan stratégique, l’École ambitionne d’être un acteur de référence dans les domaines de l’innovation et l’entrepreneuriat, la transition énergétique et les matériaux pour des technologies plus économes, les mathématiques et l’ingénierie numérique pour la transformation de l’industrie, y compris la santé, tout en restant fidèle, depuis sa création en 1783, à ses valeurs de solidarité et d’ouverture vers la société.
https://www.minesparis.psl.eu/

 

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